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28 mars 2020 6 28 /03 /mars /2020 11:04

La démocratie sera-t-elle la prochaine victime du coronavirus ?

La vitesse à laquelle la liberté de circuler a été mise à mal, la large acceptation du fait par l’opinion, l’éventualité de mesures plus fortes encore et notamment la mise en place d’un suivi des déplacements via la géolocalisation des portables, conduisent à poser la question.

L’urgence s’est refermée comme un piège implacable sur la plus évidente et la plus simple des libertés, celle d’aller et venir sans en rendre compte, en tout anonymat. Sous le poids d’une priorité supérieure, ce socle de nos démocraties a volé en éclat en deux jours seulement, du matin d’un dimanche où l’on nous demandait d’aller voter au matin du mardi où mettre le nez dehors devenait un délit.

Ce qui aurait été impensable si peu auparavant est devenu réalité sous la poussée d’une injonction supérieure: sauver des vies. Qui pourrait être contre ?  Dans ce contexte, la critique du confinement et de la surveillance est devenue inaudible, on peut le comprendre et ce d’autant plus que lorsque ce confinement sera levé et l’épidémie jugulée, qui pourra décemment regretter ces quelques semaines de liberté réduite et condamner ces contraintes provisoires ?  Tout cela nous apparaitra comme un bien petit mal au regard de l’enjeu.

Oui mais… dans quel engrenage mettons-nous chaque jour un peu plus le doigt ?

Demain sans doute, sauf à envisager un effondrement général des sociétés, de nouvelles technologies rendront la surveillance toujours plus facile et les manquements toujours plus aisés à repérer et sanctionner.

Internet et nos téléphones déjà savent presque tout de nous, la vie privée est morte, le droit à l’oubli une mascarade. Tout de notre vie peut être su, du plus anodin au plus intime.

L’hypothèse qu’un jour chaque humain se voie implanter une puce déclinant son identité et moult renseignements n’est plus interdite, certains y adhèrent. Tous les déplacements pourront alors être surveillés, et enregistrés à jamais. Il ne sera même pas nécessaire de l’imposer, il suffira simplement de rendre impossible la vie à ceux qui n’en seront pas munis, comme il est difficile désormais de vivre sans internet, sans carte bancaire, sans portable. 

Chacune de ces mesures liberticides pourra être précisément justifiée, aujourd’hui, la lutte contre le coronavirus, demain la sécurité face à la délinquance, les coupables pourront être confondus, les innocents rapidement être mis hors de cause, les crimes ainsi largement évités. Des personnes égarées ou blessées pourront être retrouvées et secourues… qui pourrait être contre ?

S’il s’appuie sur la technologie, le combat pour une surveillance généralisée sera néanmoins véritablement gagné du fait de son acceptation par la population. Aujourd’hui, le visage de la très grande majorité de la population chinoise est enregistré dans des bases de données associées à des logiciels de reconnaissance faciale. Partout dans le monde ce procédé se généralise. Quand toute une génération n’aura connu que cet état de fait, il apparaîtra comme normal et les mises en gardes de quelques vieillards passéistes pèseront bien peu.

Pourtant, nous aurons été prévenus, le 20ème siècle a foisonné d’œuvres de science-fiction du Meilleur des mondes d’Huxley  à 1984 d’Orwell ou  aux Monades urbaines de Silverberg, décrivant très précisément ce qui est en train de se passer : une société de surveillance, une injonction à penser comme il faut (ou tout simplement, à ne pas penser), une liberté de circulation mise en cause, le tout rendu acceptable par un certain confort de vie et parfois par une large liberté sexuelle. A coups d’arguments ponctuels, à coups de renoncements successifs et de facilités supposées progressistes, les hommes auront perdu la liberté, pire, ils l’auront vendue !

Attention, non seulement toutes les dictatures seront possibles, mais l’homme sera réduit à l’état de robot. Attention aussi, chaque petit pas en ce sens nous paraîtra justifié et là est le piège, le mécanisme est impitoyable.

A tous ceux d'ailleurs qui auraient des doutes quant à la réalité de cette marche vers 1984, voici une émission ou l'on apprend comment le gouvernement utilise les "nudges" pour manipuler l'opinion.

Sur ce thème, voir également cet article : La surveillance, germe de la dictature.

Didier Barthès

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commentaires

M
Très bon article en effet, là dessus je suis à 100% d'accord avec Didier Barthès ;-)<br /> Pour en rajouter à ce que dit Daniel Martin, comme par hasard notre ministre de l'Intérieur vient de passer une commande de 650 drones pour un montant de 4 millions d'euros. Christophe Castaner a expliqué aux sénateurs que cette commande n'avait "strictement rien à voir avec l’épidémie car elle a été décidée bien avant que le Covid n'apparaisse, même en Chine." Autrement dit c'est une simple coïncidence. Ben voyons !
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D
Excellente réflexion sur une réalité sociétale qui existe déjà en partie, mais va s'amplifier. Le ministre de l'intérieur Castaner ne vient-il pas de déclarer que pour le suivi permanent des citoyens ( en se servant de l'alibi du Covid-19) par leur portable serait accepté par les Français... Un comble!
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N
Encore un excellent article, cela me rappelle les films "Métropolis" (1927) et "Soleil vert" (1973). Si je comprend qu'en France il y ai actuellement des restrictions à la liberté de circuler, en Polynésie nous subissons les même restrictions alors que la situation actuelle est de 30 cas confirmés, 1 hospitalisation et 0 décès. Au plaisir de vous lire...
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D
Oui, j'ai parfois ce sentiment étrange que la science-fiction est en train de devenir réalité.
T
La plupart des pays (hors Pays-Bas je crois)ont préféré gouverner d'une main de fer pendant cette épidémie plutôt que faire confiance au sens civique. Il est vrai que le sens civique n'est pas ce qui est le plus partagé. Cela pose la même question donc pour tout ce qui concerne la protection de la planète : " La démocratie, l'information et la bonne volonté de chacun suffiront-ils pour sauvegarder notre planète?" Pour l'heure, l'urgence est au Covid , au confinement et à la militarisation de nos sociétés. Nous sommes "en guerre" et le gouvernement prend des accents à la Clémenceau pour justifier toutes les mesures coercitives (dont celles de certains potentats locaux comme le maire de Sanary) et pour mieux cacher ce que notre assentiment au Village Globalisé et à la croissance infinie sur tous les plans, a induit de dégâts et d'interdépendances pathogènes.<br /> Une journaliste, Marta Pérano rappelle cette vérité à propos de l'efficacité de la gestion à Chinoise du Covid :l'efficacité du totalitarisme n'a jamais eu pour but la protection des citoyens,mais la survie du régime.<br /> Un monde à 10 milliards d'humains avec ses pandémies, ses violences sociales, ethniques ou religieuses et ses dangers écologiques, sera forcément dictatorial...pour le bien-être de ces citoyens.
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D
"L''efficacité du totalitarisme n'a jamais eu pour but la protection des citoyens, mais la survie du régime."<br /> Voilà, rien à ajouter, vous avez tout dit.

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