L’ONU vient de publier ses dernières statistiques démographiques comprenant notamment des projections pour l’ensemble du 21e siècle.
Voici les principales données que nous pouvons retenir concernant les projections.
Evolution des projections de l’ONU à échéance 2050
(Données arrondies aux 100 millions les plus proches)
En 2009 : 9,1 milliards En 2015 : 9,7 milliards En 2022 : 9,7 milliards
En 2011 : 9,3 milliards En 2017 : 9,8 milliards En 2024 : 9,7 milliards
En 2013 : 9,6 milliards En 2019 : 9,7 milliards
Evolution des projections de l’ONU à échéance 2100
(Données arrondies aux 100 millions les plus proches).
En 2011 : 10,1 milliards En 2019 : 10,9 milliards
En 2013 : 10,9 milliards En 2022 : 10,4 milliards
En 2015 : 11,2 milliards En 2024 : 10,2 milliards
En 2017 : 11,2 milliards
Projections 2024 de l’ONU à échéance 2100
(Données en milliards, arrondies au million le plus proche pour la population au 1er juillet de chaque année).
En 2030 : 8,569 En 2055 : 9,846 En 2080 : 10,283
En 2035 : 8,885 En 2060 : 9,989 En 2085 : 10,288
En 2040 : 9,177 En 2065 : 10,102 En 2090 : 10,272
En 2045 : 9,440 En 2070 : 10,189 En 2095 : 10,235
En 2050 : 9,664 En 2075 : 10,250 En 2100 : 10,180
Rappelons que si les projections à 2050 sont relativement fiables (elles sont d’ailleurs assez stables autour de 9,7 milliards), donner des chiffres à quelques millions près pour la fin du siècle relève du pari, nous ne savons pas grand-chose de l’état du monde à cette échéance et donc pas grand-chose non plus de la fécondité et de l’évolution de l’espérance de vie dans les décennies qui nous en séparent. Les projections pour 2100 ont d’ailleurs varié de plus de 1 milliard entre 2011 (10,1 milliards) et 2015 (11,2 milliards) soit en 4 ans seulement, l’incertitude est manifestement de mise.
Depuis quelques semaines, ces projections donnent lieu dans les médias à nombre de commentaires laissant poindre la menace d’un effondrement, peut-être proche, de la démographie planétaire, en tout cas, d’un retournement des tendances qui, il y a quelques années encore, laissaient deviner une croissance qui se prolongerait plus longtemps et conduirait à des niveaux démographiques plus élevés.
Commentaires donc majoritairement très curieux au regard des propres chiffres de l’ONU, la population n’ayant jamais - et de loin - été aussi nombreuse (un point à ne pas oublier) et étant amenée à croître encore de plus de 2 milliards d’ici l’an 2100. L’Afrique passerait de 1,5 à 3,8 milliards de personnes, soit une augmentation de 2,3 milliards (les autres continents baissant donc très légèrement, l’Europe passant même de 745 à 592 millions. C’est évidemment sur ce dernier point que se focalisent les inquiétudes en Occident.
Ce qui justifie ces commentaires alarmistes aux yeux des partisans d’une population toujours plus nombreuse est la confirmation d’un certain ralentissement de la fécondité. Au niveau mondial, elle passerait de 2,25 enfants par femme aujourd’hui à 1,84 en 2100 soit en dessous du seuil de renouvellement des générations (avec de larges différences entre nations, même si celles-ci sont supposées s’atténuer avec le temps).
En effet, dans les pays à hauts revenus, la fécondité partant d’assez bas (1,47 en 2024) remonterait légèrement (jusqu’à 1,60 en 2100) et, à l’inverse, en Afrique, partant de très haut (4,02 en 2024) elle tomberait à 2,02 à la même échéance. Il ne s’agit toutefois que de conjectures manifestement influencées par le choix d’un modèle de convergence des sociétés qui, lui-même n’est qu’une hypothèse basée sur le pari d’une continuation des évolutions récemment constatées.
Cette baisse tendancielle de la fécondité conduit à une projection pour 2100 d’environ 10,2 milliards de terriens, un peu inférieure à la précédente (10,4 milliards étaient prévus en 2022) ainsi qu’à un léger avancement de l’année de stabilisation, désormais envisagée pour 2084 au niveau de 10,3 milliards.
En réalité cet infléchissement pour 2100 n’est pas nouveau, on le note déjà depuis 4 ou 5 ans dans les projections antérieures de l’ONU. Il avait aussi été souligné par différents organismes comme l’IHME et la banque HSBC qui prévoyaient même des baisses encore plus brutales (analyses qui avaient cependant été fort contestées).
Plusieurs choses sont regrettables dans la majorité des analyses
- La non prise en compte du niveau atteint et l’absence de recul par rapport à ce qu’a été la démographie tout au long de l’histoire de l’humanité. Encore une fois nous étions 5 fois moins nombreux au début du 20e siècle et le taux de croissance y était 2,5 fois plus faible ! Or, certains nous demandent d’accélérer encore notre expansion démographique, il y a là une déconnexion complète d’avec les réalités.
- Une focalisation sur des aspects strictement économiques. Les inquiétudes portent notamment sur l’évolution du ratio actifs / inactifs, en oubliant que les jeunes restent désormais longtemps inactifs et que surtout ils sont les vieux de demain. Relancer la fécondité c’est donc s’engager dans une spirale infernale où l’équilibre n’est acquis qu’au prix d’un mouvement permanent de fuite en avant évidemment intenable dans un monde fini.
- Un oubli total des questions écologiques et en particulier de l’effondrement du vivant. 96 % de la masse des mammifères est aujourd’hui constituée d’humains ou de leurs animaux domestiques. Est-il urgent, sage, moral, ou simplement raisonnable d’éradiquer par notre nombre et donc notre omniprésence les 4 % d’animaux sauvages qui subsistent ?