Abandonnons un instant l’écologie politique, l’écotaxe et les débats internes à nos « verts » pour revenir au fondamental : s’émerveiller devant la nature et découvrir quelques-uns de ses mystères.
C’est ce que nous propose Il était une forêt, le film de Luc Jacquet qui met en scène les étapes de la reconstitution d’une forêt primaire et certaines des extraordinaires interactions entre les arbres ou entre eux-mêmes et les animaux.
Si l’idée est excellente, l’impression reste mitigée sur le plan technique. Les images n’ont rien d’exceptionnel et l’on ne saurait reprocher à ce film un esthétisme envahissant. L’ensemble, malgré la fixité obligée des acteurs aurait pu être beaucoup plus impressionnant. On regrettera surtout l’introduction quasi permanente d’images de synthèse. Ainsi la levée des jeunes pousses, mais aussi l’émission des messages chimiques par les plantes sont-elles systématiquement représentées par des sortes de dessins animés dont on se demande ce qu’ils viennent faire là. Quand on aimerait se plonger dans la nature, ils nous ramènent toujours à l’artifice et détruisent toute magie. Pour la croissance de la végétation par exemple, l’utilisation, bien que classique, d’images en accéléré aurait été largement préférable. Sans être désagréable, la musique omniprésente n’a guère sa place ici quand les bruits de la forêt nous auraient tellement mieux plongés dans ses envoûtements. Ce film construit autour de la tendresse évidente et touchante du botaniste Francis Hallé pour les arbres pose un problème : on ne se sent presque jamais au cœur de la forêt. Le message est sincère mais il est dit trop sobrement et ne dégage pas la poésie qu’on pouvait en espérer même si l’on ne peut qu’être fasciné par le terrible figuier étrangleur.
Le volet documentaire aussi est un peu léger. Quiconque a lu les ouvrages de Jean-Marie Pelt n’apprendra pas grand chose sur la question et l’on aurait aimé plus d’exemples de l’extraordinaire sophistication des communications inter végétales. Quoiqu’évoquées plus largement, les milles astuces de la dissémination des graines par les animaux auraient, elles-aussi, gagné à être multipliées et détaillées.
Pour les enfants ce film constitue par contre une excellente initiation d’autant, que le message principal, s’il pouvait être entendu, rattraperait à mes yeux toutes les petites imperfections du film. Protéger la nature ce n’est pas prendre des mesures compliquées, c’est juste lui laisser de l’espace et du temps. C’est apprendre à partager le monde avec le reste du vivant. Francis Hallé et son immense amour de la forêt nous dit là une chose très juste.
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Il était une forêt, un film de Luc Jacquet avec Francis Hallé. Jean Luc Jacquet est également le réalisateur de La marche de l’empereur.