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20 novembre 2014 4 20 /11 /novembre /2014 11:04

Faut-il y croire ? A Brisbane, Australie, les principaux dirigeants de la planète ont fait le pari de la croissance – objectif + 2.1 % - tout en prenant position, dimanche 16 novembre, en faveur d’une action « résolue et effective » sur le climat Comme le dit Claire Guélaud  (1), ce sommet « restera probablement comme le G20 où le climat s’est imposé comme un sujet majeur, un peu plus d’un an avant la conférence de Paris (COP21) de décembre 2015. Le terrain avait été préparé par le sommet Asie-Pacifique de Pékin où les États-Unis et la Chine ont annoncé des objectifs précis de réduction de leurs gaz à effet de serre. Quand les deux premières économies du monde, et ses deux plus grands pollueurs, s’engagent, difficile de résister ! »

Qu'ont tenté nos dirigeants à Brisbane ? En fait, ils ont simplement essayé de répondre aux deux principaux défis auxquels les pays du G20 sont confrontés. Un premier défi immédiat qui est celui du chômage qui frappe une partie non-négligeable de leurs populations, chômage identifié comme l'effet d'une trop faible croissance du PIB de chacun des états et qui déstabilise les sociétés. Un second défi de moyen terme, celui d'une crise écologique globale qui commence à être perçue au sommet des états comme potentiellement gravissime, notamment à travers la question du réchauffement du climat.

Pour faire face au premier défi, le G20 de Novembre 2014  propose un « plan d'action Brisbane » qui passe par des réformes structurelles afin d'augmenter la valeur du PIB des pays du G20 de 2,1 % supplémentaires par rapport à la trajectoire qu'elle suivrait d'ici à 2018 ; le G20 veut aussi une coopération renforcée dans le secteur de l'énergie pour garantir des marchés énergétiques plus stables et prévoit d'améliorer le fonctionnement du marché du gaz ; le G20 souhaite encore faire la promotion des investissements d'infrastructures, publics et privés via une plate-forme ad hoc chargée de faire le lien entre gouvernements, groupes privés et banques de développement pour dynamiser les grands travaux. Le tout dans un cadre financier plus strict d'une part en soutenant les réformes en cours dans le secteur bancaire pour imposer des règles plus rigoureuses de capital pour les banques mondiales d'importance systémique, et d'autre part en affirmant sa volonté de limiter  les process d'optimisation fiscale.

Bref il s'agit de sécuriser le jeu d'une économie mondiale par trop dérégulée tout en levant le maximum d'obstacles pour que la croissance économique reparte de plus belle.

Quant au second défi,  le G20 s'engage à promouvoir une « action forte et efficace » et prévoit de renforcer les moyens du Fonds Vert de l'ONU destiné à aider les pays en développement à s'adapter aux effets du réchauffement climatique. Comme le dit François Hollande, « Le G20 représente un acquis très important pour nous retrouver à Paris et signer l’accord global qui permettra d’éviter une augmentation de 3 ou 4 degrés de la température de la planète, ce qui serait source de catastrophe, pour ne pas dire de guerre. »

S'il faut se réjouir de voir la question écologique désormais traitée dans l'enceinte prestigieuse du G20, il n'est toutefois pas interdit de se demander si la volonté de poursuivre à tout prix une logique de croissance élevée - supposant d'après les experts (2) une hausse de la consommation mondiale d'énergie de 40 % en 25 ans - est compatible avec les recommandations du GIEC.

En fait à Brisbane nos dirigeants ont fait le pari d'une croissance forte dans le respect des grands équilibres de la planète, c’est-à-dire qu'ils ont fait le pari de l'effectivité du développement durable. Pari déjà fait au sommet de Rio il y a plus de 20 ans, et qui n'a rien donné sinon une aggravation de quasiment toutes les données écologiques de notre planète (3). Le pari de Brisbane pourrait être le pari de trop.

Reste à proposer un plan B, plan qui commence à se dessiner chez les écologistes qui refusent les facilités démagogiques de la croissance verte. Plan qui viserait une prospérité sans croissance à base de low-tech (4), de vita povera et d'une démographie maîtrisée.

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1 : In  « Pour la première fois le G20 s'engage pour le climat » , Le Monde Economie du 17.11.2014.

2 : Voir Hayat Gazzane, « La consommation mondiale d'énergie bondira de près de 40 % d'ici 2040 » in Le Figaro du 12.11.2014.  

3 : On peut d'ores et déjà s'interroger sur la validité des engagements pris par les États-Unis au récent sommet Asie-Pacifique à Pékin (où les États-Unis se sont engagés sur une réduction de 26 - 28 % de leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2025 par rapport à 2005) quand on voit ce qu'en dit Mitch Mc Conell, le chef de la majorité républicaine au Sénat américain :  « Ce projet irréaliste, que le président (Barack Obama) refourguera à son successeur, veut dire à coup sûr des prix de l'énergie plus élevés et encore beaucoup moins d'emplois ». Pour Mc Conell, la diminution prévue du recours au charbon n'est qu'une « guerre idéologique du président » et il importe « d'atténuer la charge que constituent déjà les régulations de l'EPA (l'Agence de Protection de l'Environnement) ».  Sur ce sujet,  « Climat : le leader républicain au Sénat juge "irréalistes" les nouveaux objectifs »   in Le Point du 12.11.2014.  

4 : Sur ce sujet, et dans la lignée des réflexions d'Ivan Illitch et de Jacques Ellul, voir aussi L'Âge des Low Tech,  Philippe Bihouix, Le Seuil, 2014, 336 pages, 19,50 €.    

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