Un article de Daniel Martin
Après la crise sanitaire sans précédent du Covid-19, notre monde reprendra-t-il ses « bonnes et vieilles habitudes » ou nous attarderons nous enfin sur la problématique démographique et l’économie amorcera-t-elle un changement radical ?
Cette crise sanitaire, incomparable à certaines autres nous permettra-t-elle de reconsidérer notre système économique, mais aussi la question démographique ?
Cette grave crise sanitaire aura permis à la majorité de nos concitoyens de mettre en évidence les incohérences, voire certaines absurdités de notre système économique et les limites de la mondialisation. Mais aussi des métiers invisibles qui paraissent soudain essentiels et d’autres plus visibles qui le sont moins ou ne le sont pas.
Par cette crise sanitaire sans précédent, le ralentissement de l’économie est des plus inquiétants d’un point de vue social, démocratique et humain. Toutefois, elle représente une opportunité à saisir pour repenser notre modèle économique. On peut néanmoins s’interroger, tant que la question démographique et ses effets ne sont pas abordés, si on est réellement en mesure de prévoir et anticiper des mesures pour éviter ce genre de choc, ou de mieux les absorber.
Cette crise sanitaire nous recentre également sur des essentiels : l’accès à l’alimentation qui impose les productions essentielles, leur acheminement et leur distribution, à la santé qui a mis en évidence les difficultés inhérent à des erreurs politique de gestion passées, à la relation avec les autres apparaissent ainsi comme des besoins les plus vitaux. Elle questionne également sur l’utilité de certaines activités et les besoins de mise en valeur pour d’autres.
Le Covid-19 sonne comme un rappel des limites démographiques.
Il a fallu un virus particulièrement violent pour nous rappeler le sens des limites et de la mesure, pour nous rappeler notre vulnérabilité, et mettre en évidence la fragilité des systèmes complexes que nous avons construits sans nous soucier de ses effets, notamment par une croissance démographique non régulée. Nous ne contrôlons pas la nature, nous en faisons partie. Quand on détruit annuellement plus de 100 000 km² de terres arables, que l’on déboise et déforeste de façon intensive en détruisant la biodiversité pour l’urbanisation ou des cultures intensives de soja et huile de palme on peut imaginer les effets.
Dans la nature l'animal a besoin d'espace et de vitesse pour survivre. Le prédateur doit disposer de beaucoup d'espace et de vitesse pour pouvoir attraper sa proie et la proie d'espace encore plus vaste et doit courir encore plus vite pour lui échapper. Si l'homme n'a plus besoin de la vitesse pour pouvoir survivre, il doit toutefois disposer d'espace. Avec une perte de 275 km2 par jour de terres arables (100 375 km² par an) sous le béton et l'asphalte, du aux effets de l'urbanisation, des voies de circulation de circulation routières, ferroviaires à grande vitesse, aéroportuaires et une population qui explose, on peut imaginer l'impact écologique ! Chaque jour, on compte 244.000 nouvelles personnes de plus dans le monde (équivalent à la totalité de la population de la ville de Montpellier), soit + 2,7 habitants de plus par seconde (compteur). Autrement dit, la population mondiale s'accroît chaque année de près de 90 millions d'habitants grâce à un nombre de naissances supérieur (environ 150 millions) à celui des décès (60 millions). Elle par ailleurs augmenté d’un milliard pour la décennie 2009-2019, (passant de 6,7 à 7,7 milliards) avec la probabilité d’atteindre les 8 milliards d’habitants en fin 2020... A lire également par ce lien :
A cet effet comme observe l’écologie science, aucune espèce ne peut indéfiniment proliférer au détriment des autres espèces comme le fait l’homme, sans se mettre elle-même en danger et disparaître. Le virus Covid-19 ne serait-il qu’un avertissent parmi d’autres ?
Certes, la médecine par la recherche peut stopper et éradiquer de plus en plus les effets des bactéries et des virus tueurs. Mais on peut s’interroger par rapport à la sélection naturelle inhérente à toutes les espèces animales à laquelle l’homme échappe ainsi de plus en plus, Est- ce que cela ne posera pas un problème majeur sur le plus long terme… Avec pour notre espèce les effets d’affaiblissement moral et physique que l’on peut imaginer et qui seraient tel que le moindre virus pourrait sur le plus long terme éliminer en quelques jours plusieurs milliards d’individus…L’homme, prédateur au sommet de la pyramide des espèces et seul animal culturel oublierait-il qu’il a une double responsabilité : l’une vis à vis des autres espèces et l’autre pour la sienne. Mais il faut prendre acte que cet oubli permanent produit des effets les dévastateurs pour la planète et qu’au fond, par un virus invisible, quand l’homme souffre, la planète souffle... En attendant, la vie continue et la dimension économique ne peut être occultée.
Le Covid-19 signe également un rappel des limites techniques et énergétiques
De même, nous avons à faire face à des limites techniques et énergétiques. Quand les frontières se ferment ou quand le pétrole se met à manquer, c’est toute la chaîne industrielle qui s’effondre. Si au niveau économique cela peut nous réapprendre l’humilité et le bon sens sur le besoin de services publics, de relocalisation d’activités en repensant le rapport au travail et des solidarités informelles, cette crise sanitaire, tout en payant le prix fort avec sa cohorte de victimes n’aura pas été totalement vaine. Mais est-ce cela qui émergera les « jours d’après » ?
Sans recours à un régime politique plus directif, notre démocratie peut-elle imposer les exigences d’un nouvel ordre économique plus conforme aux exigences écologiques?
Remettre en cause les incohérences actuelles du système économique, ne passe-il pas par cesser de concentrer toutes nos productions dans la zone Asiatique, alors que l’on peut produire en France ou en Europe ces importations, ce qui impose des coûts énergétiques considérables pour le transport des produits finis. Certes, cela suppose une reprise en main de l’économie et du système bancaire par le pouvoir politique, éventuellement par des nationalisations ou prise de participation de l’État avec minorité de blocage. Mais cela ne peut se faire que de façon « directive » et concertée au niveau Européen, et non en laissant la « main invisible » du marché libre d’agir au gré des fluctuations boursières…
Faire cesser également certaines absurdités actuelles du système économique
Remettre en cause également l’une des absurdités du système économique est une urgence écologique quand un produit parcours plusieurs itinéraires de longue distance, alors que l’on peut faire plus court par des relocalisations. Il s’agit aussi de mettre un terme aux aberrations d’une production locale qui va faire des milliers de kilomètres pour être transformé ou reconditionner et qui revient ensuite à son point de départ pour être consommée...
Par exemple, En 2017, la distance moyenne parcourue par un produit alimentaire entre son lieu de production et l’assiette du consommateur dépasse la plupart du temps les 2 000 km, et d’autres font jusqu’à 4 800 km ! C’est démentiel ! Il faut se souvenir, par exemple, que le semi-remorque qui a pris feu dans le tunnel du Mont-Blanc, en 1999, était chargé de farine et de margarine belges expédiées en Italie? La margarine devant y être simplement emballée, avant que les paquets ne repartent pour être vendus en… Belgique.
Quand on sait que dix millions de coquilles Saint-Jacques des Côtes d’Armor sont envoyées en Chine pour y être nettoyées avant de revenir en Bretagne se faire garnir… « C’est une question de coût, on ne peut guère faire autrement …» explique un responsable d’une usine bretonne. Sans oublier l’affaire des « lasagnes à la viande de cheval » qui a montré une complexité et une longueur des circuits alimentaires que le consommateur ne soupçonnait pas.
Face à cette folie énergivore et à une agriculture industrielle de plus en plus suspecte, la seule solution est de produire au plus près et de consommer local. Le circuit court peut avoir plusieurs définitions : Aux Etats-Unis c’est une distance de 250 km entre le producteur et le consommateur. Au Canada, c’est 120 km. En France un circuit de proximité est fixé à 150 km. Bien entendu, hors agriculture Bio, la seule notion de circuit de proximité ne garantit pas la qualité des produits alimentaires, mais les circuits longs, aux mains de l’agro-business sont toujours plus suspects.
Repenser l’économie doit induire de nouveaux rapports humains et un nouveau rapport au travail, c’est est une urgence sociale, écologique, culturelle. Ainsi avec la nouvelle révolution numérique par le développement du travail à distance, ce nouveau rapport au travail par la remise en cause du « présentéisme » doit surtout éviter l’isolement à domicile, de manière à garantit la sociabilité des individus assujettis à cette forme de travail.
Par rapport à la nouvelle révolution numérique des « intelligences artificielles » rendu inévitable pour l’économie, mais pas seulement
Une nouvelle mutation anthropologique avec un nouveau type de société produit un nouveau type d’individu qui est amené aujourd’hui à agir souvent dans un contexte de vie de plus en plus incertain.
Après la machine à vapeur, la production d’électricité et l’invention du moteur électrique, suivi du moteur à explosion avec une modification en profondeur du rapport au travail, des déplacements, des relations sociales et du rôle de la femme, notamment avec la première guerre mondiale, ces découvertes avaient provoqué une mutation anthropologique en totale rupture avec les précédentes. Avec la nouvelle révolution des « intelligences artificielles » nous assistons à une nouvelle mutation anthropologique totalement différente et sans lien avec les précédentes.
Les avantages ne doivent pas occulter les inconvénients
A cet effet, si la nouvelle révolution numérique offre des avantages concernant la réduction des mobilités avec mise en place souhaitée de s-hub d'accueil de télé travail, elle suscite des craintes justifiées, tant sur le plan économique et sociétal, voire culturel, ainsi que sur le plan environnemental et énergétique. N’oublions pas que les terres rares (qui ne le sont pas toutes) dont sont issus les métaux rares indispensables aux intelligences artificielles, mais aussi à l’éolien et au photovoltaïque, sans compter l’usage quotidien des ordinateurs, smartphone, télévision, appareils ménagers etc. sont une matière fossile qui n’est pas inépuisable. Quand on sait que la Chine détient plus de 90 % de la production mondiale, alors qu’elle possède un peu plus de 30 % des réserves mondiales (44 millions de tonnes métriques pour 120 millions de tonnes métriques dans le monde en 2019) peut imaginer le pire.
Les robots ont désormais « changé de statut » et cela ne cessera pas de progresser
Avec le changement de statut des robots par internet et l’interconnexion entre eux, où aujourd’hui on peut faire fonctionner des entreprises (dites entreprises 4.0) sans peu d’intervention humaine, ce qui va s’amplifier demain avec la 5 G, en particulier dans les entreprises de la grande distribution, compte tenu des nouvelles habitudes d’achat et de livraisons. Il n’y aura d’ailleurs pas que les entreprises de la grande distribution qui seront concernées par la nouvelle révolution numérique, dont nous n’en sommes qu’à la préhistoire, sauf fin brutale de l’humanité...
Dans tous les domaines : entreprises, services, santé, hôpitaux, enseignement, transports, militaires etc. désormais l’Intelligence artificielle s’installe partout avec des applications de substitution totale de l’intervention humaine aux robots par phases successives. Il est évident que l’intelligence artificielle va susciter des espoirs, parfois surréalistes, mais aussi des craintes apocalyptiques, dont certaines peuvent être justifiées, compte tenu de notre culture actuelle.
Aujourd’hui on est en mesure de confier des taches sélectives de décision, notamment, pour la justice, la médecine, l’enseignement, mais aussi faire déplacer des véhicules sans chauffeur ou des drones-taxis sans pilote, y compris faire fonctionner des usines sans aucune intervention humaine grâce aux interconnexions de l’intelligence numérique entre les machines, avec toutes les conséquences d’éthique que cela suppose. Par exemple, s’agissant de la justice pour désengorger les tribunaux, lorsque cela ne relève pas de décisions concernant des jugements dans des situations complexes, où elles doivent être prises en « son âme et conscience », les robots peuvent très bien suppléer les magistrats pour prononcer des sanctions en fonction de critères très précis.
Aller vers un développement généralisé de « l’entreprise 4.0 » qui semble inévitable ne doit pas se faire en détruisant les structures actuelles, ni en construisant de nouvelles installations flambant neuves… Il faut partir de l’existant pour effectuer progressivement des transformations. Une évolution sera beaucoup plus efficace si elle est effectuée par petites étapes, tout en ayant une vision à plus long terme. C’est indispensable si l’on veut éviter une fracture sociale brutale et gagner du temps, car nul doute que de nouvelles activités, aujourd’hui insoupçonnables, apparaîtrons beaucoup plus compatible avec cette nouvelle ère post-croissance dans laquelle nous sommes entrés. Au début des années 1990 nous ne pouvions imaginer l’existence des plateformes numériques et leur impact sur notre vie quotidienne actuelle, bien qu’elles puissent soulever d’autres problématiques, notamment sur le plan social.
Pour conclure
Le Covid-19, outre les contraintes de confinement, nous impose une économie de survie où seuls les produits de première nécessité (alimentaire, énergétiques, santé, déplacements) doivent faire l’objet d’une production, de son acheminement et de sa distribution. Toutes les autres activités sortant de ce cadre, hormis les liaisons téléphoniques et internet, sont suspendues. Mais au fond, faute d’une décroissance démographique choisie et équitable, cela ne préfigure-t-il pas une vie à venir dans le cadre d’un l’effondrement envisagé de la société thermo-industrielle ?