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24 novembre 2016 4 24 /11 /novembre /2016 12:13

La radio RCF par la voix de Pierre Blanc a proposé récemment au porte-parole de Démographie Responsable d’exposer toutes les raisons pour lesquelles, la démographie était au cœur de la problématique écologique. Vous trouverez ici un lien vers cette interview et ci-dessous  sa retranscription.

Interview RCF Isère : 14 novembre 2016

Pierre Blanc - Didier Barthès

Pierre Blanc : Bonjour à tous, dans ce magazine Nature et Environnement qu’est la Maison Commune, nous allons aborder une question un peu difficile, la démographie mondiale. Question souvent mal traitée parce que rarement posée d’abord, voire très  mal posée parfois notamment en période électorale, voire totalement taboue donc assez souvent impossible à ouvrir.

Nous allons le faire car notre émission en charge de la vie sur la planète et de sa protection se doit d’ouvrir le micro.

A ce micro j’ai invité aujourd’hui le porte-parole de l’association Démographie Responsable : Didier Barthès. Monsieur Barthès, je vous laisse l’occasion de vous présenter

Didier Barthès : Bonjour, Merci de votre accueil et de votre invitation. Je suis en effet le porte-parole de l’association Démographie Responsable. Je suis économiste de formation. J’ai longtemps travaillé dans l’édition et dans le domaine de la télématique qui est l’ancêtre d’internet. Depuis quelques années, je partage ma vie entre des cours d’astronomie que je donne et le militantisme écologique.

J’anime un blog : Economie Durable sur le sujet, je milite au Mouvement Ecologiste Indépendant mais surtout je suis donc le porte-parole de cette association Démographie Responsable qui essaye de faire partager cette idée que la démographie est un facteur clef pour la protection l’environnement, que c’est peut-être le facteur central et vous l’avez déjà dit que c’est également  malheureusement  le facteur négligé.

PB : Démographie Responsable, les deux mots donnent tout de suite le ton. Nous allons avec vous et grâce à vous développer ce sujet qui n’est pas facile. D’abord je souhaiterais volontiers un état des lieux. Si la question se pose c’est qu’elle mérite de se poser selon vous et pourquoi ?

DB : Elle mérite de se poser pour une question d’ordre de grandeur. Comme en beaucoup d’autres domaines, il est important de connaître les ordres de grandeurs et de comprendre que l’on vit une époque tout à fait particulière en matière de démographie dans l’histoire de l’humanité.

Aujourd’hui nous sommes entre 7,4 et 7,5 milliards d’habitants sur la planète, c’est une situation extrêmement récente. L’essentiel de son histoire, l’humanité a été, comme les autres prédateurs, présente en très petit nombre.  Il y a 100 000 ans les effectifs de l’humanité  se situaient probablement entre 50 000 personnes et un million de personnes, probablement moins d’ailleurs.

Jusqu’à il y a 10 000 ans on estime que les effectifs de l’humanité étaient entre 5 et 10 millions d’habitants soit un sur mille par rapport à ce qu’ils sont aujourd’hui.

PB : Un sur mille par rapport à aujourd’hui ! 

DB : C’est un autre monde, cela n’a rien à voir. Avec ce qu’on appelle la révolution néolithique, c’est-à-dire l’apparition des grandes cités et l’organisation de l’agriculture, la croissance démographique a commencé à décoller et il y a 2 000  ans à peu près, à l’époque de Jésus-Christ nous étions entre 150 et 250 millions d’habitants disons 200 millions d’habitants.

PB : C’est loin des 7 milliards aujourd’hui.

DB : C’est très loin des 7 milliards, c’est 35 à 40 fois moins, prenez une salle de classe, c’est comme si il n’y avait qu’un seul élève au lieu d’une salle complète.

La démographie a crû relativement doucement jusqu’à l’an 900 et puis à partir de là et de l’an 1000 ça a commencé à monter, il a eu l’épisode brutal de la grande peste qui a marqué une petite pause. Ça a monté doucement et puis avec la révolution industrielle on a commencé à connaître une croissance plus importante. A partir de 1800 ou un peu après on a atteint le fameux seuil du premier milliard. Puis en 1930 : 2 milliards, 1960 : 3 milliards,  1974 : 4 milliards,  5 milliards un peu après. On est maintenant entre 7,4 et 7,5 milliards. Nous sommes aujourd’hui sur un rythme de un milliard de plus tous les 12 – 13 ans.

PB : Un milliard de plus  tous les 12 – 13 ans, ça fait des proportions gigantesques. J’ai lu que l’on rajoute à la population mondiale tous les 10 mois l’équivalent de la population française.

DB : C’est ça, c’est 80 millions de plus par an, donc ça fait à peu près ça. Une autre façon de le dire, c’est Paris tous les 10 jours, c’est 218-220 000 personnes tous les jours donc un peu plus de 2 millions tous les 10 jours, une ville comme Paris.

PB : Ce qui est intéressant c’est d’avoir à l’esprit ces données, on en parle pas souvent, très peu.

Donc là c’est un état des lieux, on voit qu’il y a du monde sur la planète, on peut s’en réjouir aussi bien sûr, mais il y a un lien très fort entre le monde sur la planète et la progression rapide, de plus en plus rapide. Il y a une progression de plus en plus rapide, c’est ça qu’il faut retenir.

DB : Oui, cette progression a été en terme de pourcentage de plus en plus rapide jusqu’aux années 1970. A cette époque-là entre 1965 et 1970 on a connu un taux de croissance de 2,1 % par an. Aujourd’hui le taux de croissance heureusement a diminué, il est un peu supérieur à 1% par an. Mais comme il s’applique à une population beaucoup plus importante, en réalité la croissance en nombre absolu est plus importante aujourd’hui. Entre 1960 et 1970 on gagnait environ 70 millions d’habitants par an, aujourd’hui on en gagne 80 comme nous l’avons dit. Donc en termes relatifs la croissance a légèrement diminué, heureusement car nous arriverions à des impossibles, mais en termes absolus elle n’a pratiquement pas diminué, elle a connu une  pointe autour des années 1995.

PB : Alors deux mots sur cette association Démographie Responsable, vous êtes nombreux ?  Elle se situe au niveau national ?

DB : C’est une association qui regroupe entre 150 et 200 personnes qui est au niveau national et qui regroupe des gens de toutes obédiences que ce soit au niveau politique ou religieux. Ce qui relie ces gens c’est un intérêt pour l’écologie, vous avez notamment des défenseurs des animaux, des végétariens…Il y a un respect de la nature qui regroupe tout le monde mais par ailleurs une grande diversité d’opinion.

PB : Alors j’ai une question : Est-ce qu’il existe un lien entre la croissance très forte de de la population mondiale dont nous sommes témoins et la dégradation de l’environnement ? C’est la grosse question me semble-t-il. Je vais le formuler autrement : Est-ce que ce sont les gens qui sont le problème ou est-ce que ce n’est pas plutôt le système de l’économie mondiale ?  Je vous laisse sur ces questions assez conséquentes.

DB : Il existe de nombreux problèmes et ni moi, ni personne, ne dispose d’une balance pour peser l’importance d’un problème par rapport à un autre. Ce qu’il y a avec la démographie, c’est que c’est un facteur qui agit sur tous les autres. Lorsque vous entendez parler d’environnement, vous entendez parler de pollution d’abord, vous entendez parler de consommation d’espace avec ce que cela suppose de pertes de variétés animales, de variétés végétales, de biodiversité comme on dit maintenant…

PB : D’énergie…

DB : Evidement vous avez la consommation d’énergie. Donc interviennent là, à la fois le nombre des hommes et leur façon de vivre. Alors, vous l’avez surement remarqué, pour l’instant, l’essentiel du militantisme écologique porte sur la façon de vivre. On nous demande demandant de consommer moins, d’être plus prudents, plus frugaux etc. Bien entendu Démographie Responsable soutient tout à fait cette démarche. Mais cette démarche n’est pas la seule nécessaire car une partie de la planète est encore relativement pauvre, c’est même la majorité. Et à cette partie-là nous ne pourrons dire « Consommez moins », ou alors il faudrait faire preuve d’un cynisme absolu.

Donc, si nous voulons donner un peu plus à consommer, un meilleur niveau de vie, un accès à l’éducation etc. Il est certain qu’on ne peut attendre de ce côté-là une baisse de la consommation mais plutôt, pour la majorité de la population, une augmentation de la consommation avec toute la cohorte d’inconvénients que cela peut avoir pour l’environnement. Donc nous disons : « Si nous voulons avoir un peu plus pour chacun, faisons un effort pour ne pas être trop nombreux ». En un mot : Nous ne serons pas à la fois riches et nombreux, donc si nous ne voulons pas être trop pauvres, peut-être faut-il faire un effort et être modestes en matière de Démographie.

PB : Alors ça c’est quel que soit le lieu sur la planète ? Il n’y a pas des façons différentes d’aborder la question de la démographie responsable ? Est-ce que cela se fait sur mesure en fonction des continents ? Les riches les pauvres, le Nord, le Sud ?

DB : Il existe des situations extrêmement variées. Il y a les pays en voie de développement qui consomment peu et qui, soit sont nombreux soit ont un potentiel de croissance démographique très important, c’est le cas en Afrique. Et vous avez les pays plus développés comme l’Europe, l’Amérique du Nord et le Japon où la démographie est quand même relativement importante, notamment en Europe, mais pour autant semble sur une voie de stabilisation mais où par contre le niveau de consommation est extrêmement élevé. Les mesures que l’on pourrait proposer ne sont évidemment pas les mêmes chez les uns et les autres.

Mais il y a dans les deux cas une chose qui est absolument essentielle et qui est souvent négligée dans l’ensemble des discours écologiques  que l’on peut entendre.  C’est que, quel que soit le niveau de développement, même dans les pays pauvres, et pardon si là je choque un peu, la présence des hommes, même frugaux, même pauvres, même, pardonnez-moi d’être un peu provocateur, même s’ils étaient tous des Pierre Rabhi, exclut de fait la présence d’un certain nombre d’animaux, les grands prédateurs notamment. Vous avez reçu récemment Yves Paccalet qui parle avec amour de ces prédateurs, mais on ne peut pas vivre au milieu de ces grands prédateurs. Donc à un moment donné, l’humain quel que soit son niveau de développement, doit partager la planète, ça c’est un message difficile à faire comprendre, car il ne donne pas seulement des boucs émissaires, il fait appel au partage.

PB : En fait la consommation d’espace par l’humanité, c’est quand même aujourd’hui pour vous notamment et vous n’êtes pas le seul, une source de destruction des différents biotopes sur la planète.

DB : Principalement, je vais vous donner d’ailleurs un exemple contraire d’ailleurs pour tous ceux qui nous disent c’est uniquement le mode de vie. Vous avez dans le monde un pays extrêmement consommateur où les gens ont probablement un  mode de vie qui devrait être un peu modéré. C’est le Canada, le Canada c’est comme les Etats-Unis, c’est comme nous, ce sont des gens riches qui consomment pas mal. Ils sont trois par kilomètre carré au Canada. Résultat : vous avez au Canada une couverture forestière absolument gigantesque, vous avez des élans, vous avez des ours, vous avez ce qu’on appelle une mégafaune, pour utiliser le terme technique. Et cela c’est donc tout à fait compatible avec un niveau de vie qui n’appauvrit pas les gens, qui leur permet quand même de bien vivre tout simplement parce qu’ils ne sont pas très  nombreux.

Essayez de trouver des élans en liberté en Hollande… Eh bien non, vous n’en trouverez pas.

PB : Et vous pensez que si l’on ne s’occupe pas de la démographie responsable, vous ne pensez pas que la planète a de quoi  nourrir tout le monde même si l’on sait que la faim existe et comment sur certains secteurs de notre Terre. La question de la nourriture des hommes, est ce que c’est la seule qui se pose.

DB : Il y a deux questions.  Est-ce qu’on pourra nourrir tout le monde ? Pour l’instant, si l’on répartissait mieux les choses, si l’on mangeait de façon moins carnée, sans doute pourrait-on nourrir tout le monde. Je suis plus prudent sur la question des gaspillages car je crois qu’il est très difficile de les éviter complètement. Mais l’on pourrait sans doute nourrir tout le monde, mais l’idée d’une planète absolument parfaite où il n’y ait jamais de gaspillage, où tout le monde soit gentil, tout le monde soit partageur, je ne sais pas si cela arrivera.

D’autre part, si l’on peut aujourd’hui nourrir tout le monde, c’est en particulier parce qu’on a une agriculture extrêmement productive qui fait appel aux énergies fossiles. Ces énergies fossiles, dans le siècle qui vient, elles vont commencer à manquer. C’est-à-dire qu’un facteur essentiel de la productivité agricole, parce que cela joue au niveau des engrais, ça joue au niveau de la mécanisation, ça joue au niveau du transport des produits, aujourd’hui les produits ne sont majoritairement plus produits où ils sont consommés. Eh bien le jour où il n’y aura plus de pétrole, pour dire les choses de manière directe, il risque d’y  avoir une très forte baisse de la productivité agricole. Donc oui, on peut probablement, dans des conditions optimales, nourrir tout le monde aujourd’hui, non demain on ne pourra pas nourrir tout le monde quand nous connaîtrons un manque d’énergie.

Ça c’était la première partie, pour la  deuxième partie : Est-ce que c’est la seule question qui se pose ? Bien sûr que non, parce  que même si l’on pouvait nourrir tout le monde, est-ce que moralement on a le droit d’éliminer tout ce qui vit sur la planète ?  Pour moi la réponse est non, tout simplement.

PB : La réponse est non, tout simplement. Nous allons dans une seconde partie aborder la question du tabou, le pourquoi de ce tabou c’est important aussi d’avoir le courage de l’aborder et notre radio le fait aujourd’hui. Nous le faisons après que Jean Ferrat nous ait dit : C’est beau la vie.

(Extrait de « C’est beau la vie », chanson de Jean Ferrat)

PB : Pouvoir encore chanter longtemps comme vient de le dire Jean Ferrat : Que c’est beau la vie !

Une démographie responsable, gros sujet  très important parce qu’il s’agit de l’avenir de la planète.

Il est vrai aussi que ce sujet a un côté très tabou, on en parle peu, très souvent on en parle mal. Et quand on en parle on se fait vite coincer,  attaquer,  pourquoi ce tabou ?

DB : Ce tabou est essentiel, vous venez de dire « on se fait vite attaquer », on est traité par exemple de malthusiens, vous savez combien cet adjectif a pris un côté péjoratif dans la bouche de beaucoup de gens.

Je voudrais illustrer ce tabou par un exemple récent. Vous l’avez peut-être vu, il vient de paraître un rapport qui s’appelle Planète vivante qui est publié par un certain nombre d’organismes de protection de la nature et qui montre encore une fois la catastrophe qui s’annonce.

Les derniers chiffres indiquent 58 % de vertébrés en moins en à peine plus de 40 ans, donc c’est une catastrophe. Eh bien, dans le même temps où la planète perdait la moitié de ses animaux, dans les 40 dernières années, elle multipliait par deux le nombre d’humains. Cette constatation qui est quand même assez simple à faire, je peux vous dire qu’elle n’est pas faite dans le rapport, elle n’est pas faite non plus dans les commentaires. Et, pardon d’être un peu dur là-dessus, elle n’est pas faite par la plupart des  écologistes.

Si vous prenez aujourd’hui le monde politique, presque personne n’évoque la question, presque tout le monde est nataliste. Il y a de rares exceptions, en France j’en connais trois. Il y a le leader du Mouvement Ecologiste Indépendant : Antoine Waechter, il y a l’ancien ministre de l’environnement : Yves Cochet et il y a eu récemment l’ancien Président de la République : Nicolas Sarkozy qui a dit que la question de la démographie devait être évoquée et qu’il souhaitait l’organisation de conférences sur ce sujet.

Pour le reste, tous les discours politiques de l’extrême gauche à l’extrême droite avec une unanimité parfaite sur ce point-là, touchante même, sont natalistes. Donc le tabou dans le discours est extrêmement fort. Il est moins fort chez les gens. Si vous discutez avec les gens dans la rue, une partie très importante d’entre eux vous disent : « Oui la question se pose ».

PB : Elle se pose, oui au moins elle se pose.

DB : Donc on pourrait en parler en choquant moins qu’on ne le croit, mais globalement les institutions sont extrêmement réticentes sur la question.

PB : Donc d’après vous, le public, l’homme ordinaire, comme vous et moi, se pose inconsciemment la question quand même, parce qu’il voit bien les chiffres qui progressent et ce n’est pas parce qu’il se pose la question qu’il devient un méchant.

DB : Bien sûr, au contraire.

PB : C’est ça le problème du tabou.

DB : Je ne vous ai pas répondu sur la question du pourquoi, il y a tout simplement un lien à l’enfant. L’enfant est sacré et si l’on dit aux gens qu’il faudrait peut-être faire un peu moins d’enfants, certains entendent que l’on est contre les enfants. Je veux tout de suite vous rassurer la quasi-totalité des membres de Démographie Responsable ont des enfants, ils les aiment largement autant que les autres. Je peux vous le promettre.

Donc le problème n’est pas cela, c’est même le contraire, parce qu’outre un respect pour la nature auquel nous tenons bien évidemment, il faut aussi que nos enfants demain puissent vivre dans un monde vivable et je vais peut-être vous surprendre en allant plus loin, mais il faut qu’eux aussi, demain, aient le droit d’avoir des enfants.

Vous savez parfois on nous dit : « Vous êtes comme en Chine, vous voulez faire la politique de l’enfant unique ». Mais il faut regarder ce qui s’est passé Chine. On y a fait cette politique de l’enfant unique quand, après des années on avait mené au contraire une politique de laisser aller et où la Chine allait à une catastrophe, elle n’aurait pas pu nourrir sa population, elle n’aurait pas pu se développer.

Donc, bien souvent les politiques autoritaires, qu’on ne soutient pas, je suis bien clair là-dessus, naissent d’une situation qui devient impossible. Donc si on veut éviter que demain nous ayons dans le monde un certain nombre de pays qui nous disent : « Ce sera zéro enfant ou au mieux ce sera un enfant », essayons d’être raisonnables aujourd’hui pour éviter les catastrophes demain.

PB : Vous êtes en train de nous dire que si rien n’est fait, on risque d’arriver à des solutions impossibles et terribles.

DB : Oui parce que les projections sont actuellement dramatiques. Depuis quelques années et contrairement à ce que nous ont dit  longtemps les démographes, la baisse du taux de croissance de la population c’est fini. Le taux de croissance de la population ne baisse plus. Dans un certain nombre de pays cela a même remonté et la fécondité même a remonté.

En Afrique du Nord par exemple elle a remonté, dans beaucoup de pays d’Afrique Sub-Saharienne c’est tout à fait catastrophique. On a le Niger avec plus de 7,5 enfants par femme. On a le Nigéria qui a presque 200 millions d’habitants. Le Nigéria ça fait le dixième de la surface des Etats Unis. Il est prévu qu’il ait entre 800 millions et un milliard d’habitants (en 2100) en entamant déjà une baisse de la fécondité, donc on voit bien que ce n’est pas possible, on voit bien que cela va conduire à des catastrophes. Donc, il faut tout faire aujourd’hui pour adoucir les choses pour éviter que demain on soit dans des situations impossibles qui nécessairement nous imposeront des contraintes.

PB : Alors puisque nous sommes dans le franc-parler, et dans le fait de poser des questions telles qu’elles sont ce que font souvent les gens mais ce que ne font pas forcément les gens qui sont responsables de la planète eux-mêmes. On est tous d’ailleurs responsables. Quelles sont les solutions ? Qu’est-ce que vous amenez comme idées. Comment faire ? Comment s’y prendre pour éviter qu’il y ait une cassure tout d’un coup ?

DB : D’abord il faut-être conscient que la démographie c’est une affaire longue, c’est une affaire qui présente beaucoup inertie. D’ailleurs c’est un problème car bien souvent,  les gens disent « de toute façon si on fait quelque chose ça ne donnera des résultats que dans 30 ou 40 ans » et comme cela on ne fait rien. Résultat des choses, comme les 30 ou 40 ans finissent par s’écouler, on arrive dans des situations catastrophiques. Il faut en avoir conscience. C’est-à-dire que quoiqu’on fasse pour la démographie, on aura les 9 milliards et demi à 10 milliards et demi en 2050, c’est quasiment acquis, c’est pour après, mais après viendra.

On a dit tout à l’heure que les situations étaient contrastées. Donc on ne va pas faire les mêmes choses dans des pays riches et dans des pays pauvres. Dans des pays où la baisse de la fécondité est déjà sensiblement entamée comme les pays européens pour la plupart d’entre eux et dans des pays comme le Niger où vous avez 7,6 enfants par femme.

Dans nos pays, même au sein pays européens la situation n’est pas la même. En France par exemple, nous avons un fort système d’incitation à la fécondité, avec un système d’allocations familiales très important, avec un système d’aides fiscales également important.

Nous, nous souhaitons adoucir ces transferts, pas les supprimer bien évidemment. Par exemple Démographie Responsable, a proposé que les allocations familiales ne soient plus progressives avec le nombre d’enfants. Et qu’on aille, pas tout de suite, et jamais de manière rétroactive, mais qu’on aille vers un système où l’on aide les gens à avoir un enfant, qu’on les aide aussi à en avoir deux et qu’après, en les ayant prévenus avant, on leur dise : « Au-delà de deux vous n’aurez pas plus que pour deux » Voilà, les allocations familiales s’arrêteraient au montant prévu pour deux enfants. Qu’un certain nombre d’aides aussi soient revues. Il ne faut jamais oublier que les aides, avant d’être des aides, sont des prélèvements sur les autres.

Il y a une aide qui est essentielle et qui est souvent oubliée c’est l’éducation. Il y a une chose qui est importante avant tout c’est que l’éducation soit maintenue, c’est-à-dire que même si vous avez six enfants il faut qu’ils aient le droit à l’éducation. Donc si on veut maintenir cette aide là, et bien sûr il ne faut surtout pas y toucher, il faut faire attention et il ne faut pas en donner tous azimuts.

Donc ça se serait pour les pays développés, éviter qu’un certain nombre de mesures politiques ou économiques  soient incitatives.

PB : Et pour les autres pays dits en voie de développement

DB : Pour les pays en voie de développement, l’idée serait que l’aide au développement soit majoritairement ou au moins de manière importante consacrée à l’aide à la contraception. Il y a encore une vraie difficulté d’accès à la contraception dans un certain nombre de pays, dans beaucoup même. Donc nous pourrions imaginer que par exemple 25 % de l’aide au développement soient consacrés à ce que l’on appelle de manière générale le planning familial.

PB : En quoi cette démarche et ces propositions étalées sur le temps, mais qu’il faut prendre tout de suite selon vous, en quoi ces démarches  sont respectueuses de l’Homme, de la vie, d’une démarche humaniste ? Ce n’est pas contradictoire selon vous ces propositions ? Peut-être même au contraire ? Je vous laisse le dire.

DB : C’est même exactement le contraire. Parce qu’il y aurait de plus humaniste, c’est de prévoir pour nous enfant un monde dans lequel on ne puisse pas vivre. Ça ce serait l’anti-humanise par excellence. C’est ce dont il faut convaincre, c’est de montre que ce combat là c’est un combat pour que le futur soit plus heureux.      

PB : Je viens de remettre à mon invité la petite phrase classique qu’il va lire en direct et ensuite il fera sa conclusion.

DB : « Le bonheur ne dépend pas de ce qui nous manque mais de la façon dont nous nous servons de ce que nous avons» C’est de Arnaud Desjardins.

PB : Je vous laisse faire votre conclusion.

DB : Tout à l’heure, quand vous m’avez demandé de me présenter, j’ai dit que parmi mes autres activités, se trouvait l’enseignement de l’astronomie. Vous savez que certains proposent que l’on aille voir les autres planètes et que l’on s’installe dessus.

Eh bien non, ce n’est pas ça qui nous manque, ce qui nous manque, c’est plutôt de nous servir de la Terre, et même plutôt que nous en servir, respectons là tout simplement. Il n’est pas nécessaire d’avoir une vision utilitariste. C’est sur  terre que  les problèmes vont se poser, c’est là que nous devrons trouver des solutions.

Ce n’est pas en inventant des choses sciencefictionnesques c’est tout simplement par un respect, par un respect de la beauté de la nature, c’est ça qui doit nous motiver et par une certaine modération, par un comportement responsable.

Nous avons la Terre, il faut la respecter, la protéger, inutile d’inventer des choses impossibles.

(Suite de la chanson de Jean Ferrat, C’est beau la vie)

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26 septembre 2016 1 26 /09 /septembre /2016 14:24

Le réchauffement climatique et la réduction des émissions de gaz à effets de serre qui en sont la cause figurent parmi les quelques questions écologiques qui ont réussi à mobiliser le monde politique. Au point que tous les ans, depuis un peu plus de 20 ans, sont organisées des COP (conférences des parties) censées coordonner l’action des États en la matière. La dernière, la COP 21 en France, avait d’ailleurs bénéficié d’une forte médiatisation.

Chaque fois, les différentes sources d’émissions et les moyens de les réduire sont étudiés. Toutes les sources ou presque, sauf une : l’augmentation continue du nombre des hommes ! Depuis 1970 l’humanité a doublé ses effectifs et bien sûr, à comportement égal a de ce fait, doublé les sources potentielles d’émissions.

Pourtant le sujet reste tabou et rares sont aujourd’hui les responsables politiques osant l'évoquer.

C’est contre cette aberration, prétendre s’occuper d’un problème tout en refusant d’aborder l’un de ses déterminants principaux, qu’a décidé de lutter l’association Démographie Responsable en lançant le 20 septembre dernier une pétition destinée aux organisateurs et participants à la COP 22 qui aura lieu prochainement à Marrakech et en leur demandant de mettre la démographie à l’ordre du jour de leur discussions.

Vous trouverez ci-dessous le texte de cette pétition vous que pouvez par ailleurs soutenir via le lien suivant :

Pour que la démographie soit évoquée à la COP 22

Cette pétition est également disponible en langue anglaise

 

Pour que la démographie soit évoquée à la COP 22

Du 7 au 18  novembre 2016 se tiendra à Marrakech la 22ème Conférence des parties (COP 22) consacrée aux questions climatiques.

Depuis 1995 et la première réunion à Berlin, chaque année de telles conférences analysent les données scientifiques, proposent des mesures et engagent les Etats à les mettre en œuvre afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Toutefois, un facteur déterminant de ces émissions - et plus généralement de la pression anthropique - a été le plus souvent passé sous silence lors des COP précédentes : la démographie.

Depuis 1995 la population mondiale a augmenté de 1,7 milliard  (+ 30 %). Selon les projections de l’ONU  nos effectifs devraient encore progresser de 3,8 milliards d’ici la fin du siècle, soit une nouvelle augmentation de 50 %. En deux siècles, de 1900 à 2100, la population humaine aura été multipliée par 7. A comportement égal, c’est donc aussi par 7 qu’aura, été multiplié notre potentiel d’émissions de CO2. Ce facteur ne peut être éternellement ignoré.

La majeure partie de cette croissance démographique devrait avoir lieu dans les pays les plus défavorisés, là où les accès à la contraception comme à l’éducation restent les plus difficiles. Là aussi où, compte tenu du faible niveau de vie, il serait aussi irréaliste que  moralement injuste d’imposer des efforts importants en matière de réduction de la consommation énergétique.

Cette pétition a donc pour objet de demander à toutes les parties prenantes à la COP 22 d’inscrire la démographie à l’ordre du jour de cette conférence  afin de proposer des mesures susceptibles de freiner la croissance continue de nos effectifs. Mesures  telles que l’extension des moyens alloués à la planification familiale et à l’éducation dont on sait qu’ils constituent un élément fondamental en faveur de la baisse de la fécondité.

De telles mesures auraient d’ailleurs d’autres conséquences favorables, sur le plan du développement, sur le plan de la justice sociale et sur le plan environnemental en réduisant l’ensemble de nos rejets comme notre pression sur les territoires. 

Association Démographie Responsable

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23 septembre 2016 5 23 /09 /septembre /2016 12:04

Un texte de Gérard Charollois

Parmi les sujets tabous et les interdits médiatiques trône la pression démographique, superbement ornée d’anthropocentrisme béat.

Les villes deviennent tentaculaires, les infrastructures ravagent les sites, la croissance est célébrée en vertu première, souvent fardée de « développement durable ». Dans le moindre village, le plus petit canton, les élus locaux courent après une augmentation perpétuelle de population, gage de leur gestion dynamique et de leur refus de voir leur circonscription devenir « une réserve d’Indiens » !

La terre se couvre d’asphalte et de béton, pour le profit des oligarques vantant leur développement, au nom du « progrès », de « l’emploi », du « désenclavement ». Les populations, anesthésiées par la propagande des milieux d’affaires, ne comprennent pas l’ampleur d’un phénomène qui n’a aucune autre finalité que sa perpétuation.

Pendant ce temps, la biodiversité s’effondre. De 2007 à 2014, 30% des éléphants de savane d’Afrique ont disparu, passant de 457 000 à 352 000 individus. En France, les oiseaux communs, ceux des parcs et jardins, ceux des zones urbaines, sont menacés d’extinction, au même titre que les amphibiens, les reptiles et les insectes.

Les causes de cette mort du vivant sur l’ensemble de la planète sont bien connues : disparition des espaces naturels, prévarication des milliardaires en mal de spéculation face à tout espace non exploité, cupidité des uns, cruauté débile des autres. Entre le promoteur, ses grands ouvrages nocifs et l’idiot de village avec son gros fusil, la nature meurt.

Ainsi, les éléphants, illustration d’un phénomène global, sont victimes des riches Chinois, dépourvus de principes moraux, qui veulent des objets d’ivoire et des braconniers, insensibles à l’écologie et au respect dû à l’animal. D’autres ignorants stupides achètent, à grand prix, des cornes de rhinocéros, pour pallier des déficits d’érections, ce qui s’avère aussi efficace que s’ils consommaient leurs ongles ou leurs cheveux !

Décidément, l’humain a bien tort de s’enorgueillir car, entre sa cupidité, sa cruauté et sa sottise, il ne mérite guère son podium ! Trop nombreux, trop prédateurs, les hommes ne laissent plus de place aux autres espèces vivantes. Du sommet des montagnes aux plaines désertiques, des pôles aux forêts tropicales, l’espèce humaine submerge tous les milieux, les transforme, les exploite, les pollue. Dans un siècle, 75% de la biodiversité aura disparu. Réduire la pression démographique devient un impératif si l’on veut sauver la diversité des formes de vies sur terre.

Comment ? Pour faire gagner la vie, récusons la mort.

Tout être vivant, donc tout humain, possède un intérêt légitime à vivre. Il est donc souhaitable, au nom de cet intérêt, de prolonger la durée de la vie de chaque individu, en lui conférant la santé. Ne limitons pas la population par la mort, mais en utilisant deux autres facteurs.

C’est par la limitation des naissances et des migrations qu’il faut enrayer la cancérisation de la terre par une seule espèce. Bien sûr, ces préconisations n’ont pas le droit de citer, car elles heurtent autant les injonctions monothéistes, favorables au natalisme, que les catéchismes politico-sociologiques, pro-migratoires.

Me voici, une fois encore, iconoclaste choquant pour tous les esprits formatés, parfaitement incorrect au regard des préjugés.

Si certains pays ont vu s’abaisser leur taux de fécondité, à l’instar de la Russie, de l’Allemagne, du Japon, d’autres sociétés perdurent à croître, provoquant des déséquilibres sociaux et économiques dont elles sont les premières victimes.

Contrairement aux politiques natalistes promues par les politiciens archaïques, il y a lieu d’orienter les aides sociales vers la personne et non vers la famille.

La croissance démographique, outre le natalisme, repose désormais, en Europe, sur l’immigration. Que voilà un autre sujet tabou, propice au naufrage de la pensée, aux hallucinations idéologiques.

J’ose l’affirmer : la migration massive et forcée est une souffrance.

Premièrement, souffrance pour la nature, car l’augmentation de population appelle une urbanisation accrue. Deuxièmement, souffrance pour les personnes migrantes, arrachées à leurs terres, à leurs climats, à leurs ancêtres.Troisièmement, souffrance pour les populations locales, elles-mêmes confrontées à des difficultés sociales.

Le natalisme est, bien souvent, fruit de l’ignorance.

L’immigration est fruit de la misère, de la guerre, des obscurantismes qui jettent les peuples sur les routes d’un exil dangereux et douloureux, d’un déracinement frustrant.

Contre le natalisme, il convient d’émanciper la femme, de la libérer des conditionnements, des commandements prétendument divins ressassés par des sociétés archaïques, de lui permettre d’accéder à une sexualité choisie dégagée de la procréation subie.

Contre les migrations de masse, il convient de guérir la misère, la violence, les guerres tribales, les superstitions identitaires qui dressent les communautés les unes contre les autres.

Victor HUGO aurait pu dire : « c’est ici le combat du jour et de la nuit ». Si l’homme extermine l’éléphant d’Afrique, l’hirondelle de fenêtre, le loup, l’abeille et le hérisson, qu’il périsse, étouffé par sa pollution ou noyé dans le sang de ses guerres communautaristes dont nous avons les prémices.

Je veux encore l’inviter à un sursaut éthique, en se débarrassant des milliardaires qui assassinent la planète par leur exploitation frénétique, en éduquant au respect de la vie les idiots de village qui tuent parce qu’ils n’ont pas appris l’unité fondamentale du vivant.

L’humanité peut se perdre par ses tares. Elle peut se sauver en mutant de comportement. Nous, biocentristes, ayons la lucidité de dénoncer les vices majeurs de notre propre espèce pour que celle-ci se réconcilie avec elle-même et avec l’ensemble de ce qui vit.

____________________________________________________________________________

Ce texte a déjà été publié notamment sur le site de Gérard Charollois : Une force pour le vivant ainsi que sur le site Altermonde-sans frontières. Ancien magistrat, Gérard Charollois, est président de l’association écologiste Convention Vie et Nature. Il est également candidat à l’élection présidentielle de 2017.

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8 mai 2016 7 08 /05 /mai /2016 16:04

Pour la première fois, un homme politique français, ancien Président de la République de surcroit, place la démographie au premier rang des questions environnementales et suggère, à l’instar de ce que l’on fait déjà pour le climat, mais avec une priorité encore supérieure, l’organisation de conférences annuelles sur le sujet afin, dit-il, « de définir une stratégie démographique sur la planète ». 

A deux reprises en effet, une première fois le 30 avril dernier au Conseil National des Républicains et dans l’entretien au JDD qui a suivi, puis de nouveau le 3 mai à l’occasion d’une journée de travail de ce parti consacrée à l’environnement, l’énergie et la mer, Nicolas Sarkozy a insisté sur la prééminence du problème de l’explosion démographique et a assuré que son parti proposerait l’organisation de telles conférences.

Des déclarations, si inhabituelles de la part d’un dirigeant politique de premier plan, montrent que le tabou commence peut-être à se fissurer.

Si Nicolas Sarkozy a tenu de tels propos c’est sans doute qu’il en est convaincu, mais évidemment aussi qu’il estime que ces paroles sont désormais en mesure d’être entendues, qu’elles ne constituent plus un handicap pour celui qui les évoque. C’est là un changement notable dans un milieu politique traditionnellement conservateur où, même lorsque les gens étaient persuadés de la gravité du problème démographique, ils préféraient garder le silence.

C’est un premier pas nécessaire pour passer aux étapes suivantes, c’est-à-dire à la généralisation de l’interrogation à l’ensemble de la classe politique, écologistes compris, puis à la tenue de telles conférences et enfin, espérons-le, à la mise en place de mesures qui seront d’autant plus efficaces et d’autant moins liberticides qu’elles seront prises tôt.

Voici un bref extrait du discours du 3 mai 2016.

« Il y a un phénomène que nous n’avons jamais connu, jamais. C’est la pression démographique planétaire qui va nous amener… à passer de sept milliards à onze milliards et demi en 2100, demain matin. Onze milliards et demi, personne n’a jamais vécu cela sur la planète... »

« Cela me paraît un défi un peu plus considérable que le seul défi du réchauffement climatique… mais alors qu’on a mis une COP 21 puis une COP  22, au Maroc  sur les changements climatiques,   Les Républicains demandent une conférence mondiale annuelle sur la démographie mondiale, sur la nécessité d’un planning familial et de  la (sur là ?)  définition d’une stratégie démographique sur la planète. »

Cette priorité qu’affiche Nicolas Sarkozy pour la démographie plutôt que pour le climat fera sans doute grincer quelques dents chez les écologistes, pourtant l’ancien président à raison d’aller à la racine du problème.

Les émissions de gaz à effet de serre sont une conséquence et non une cause première, conséquence de notre mode de vie et de nos effectifs toujours croissants. Si le premier de ces facteurs, le mode de vie, est régulièrement mis en cause, la démographie a pourtant sa part de responsabilité. Aucune personnalité aussi marquante n’avait jusqu’alors oser l’affirmer en public (*).

Bien entendu de tels propos ouvrent la porte à mille débats : Qui sera concerné ? Les pays à plus forte croissance démographique ? Les pays à plus forte densité ? Quelles autres actions - on pense notamment à l’éducation et au développement du planning familial - doivent être menées de pair ? Comment faire concrètement accepter l’idée d’une descendance plus modeste à des personnes pour qui cela semble la seule richesse ? Comment financer ces efforts ?  

Ces questions seront justement l’objet des conférences si le projet se concrétise; elles valent la peine d’être posées et la rupture mérite d’être soulignée.

(*) Nicolas Sarkozy a-t-il été convaincu par la lecture de ce livre ? A-t-il parcouru le site de l’association Démographie Responsable qui milite en ce sens depuis plusieurs années ?

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10 février 2016 3 10 /02 /février /2016 15:24

Il est souvent instructif d'aller voir ce que produisent les grands machins comme les Nations Unies. En l'occurrence, leurs discours sur la démographie semblent, au vu des politiques suivies en Europe occidentale, être pris au sérieux par nos dirigeants politiques. Et c'est le premier mérite de l'article de Denis Garnier d'attirer notre attention sur le thème de la nécessité qu'auraient nos pays d'importer des populations « pour éviter le déclin et le vieillissement de la population qui résultent des taux bas de fécondité et de mortalité. »

Nécessité qu'on peut d'autant plus interroger, comme le souligne le président de Démographie Responsable, que les pays cités dans l'étude des Nations Unies sur les migrations de remplacement ont déjà des densités de population qui oscillent entre 200 et 500 habitants au km². Or un tel taux de densité suppose une exploitation intensive des biotopes, exploitation incompatible avec un usage prudent et responsable de nos territoires. Même un mode de vie frugal ne serait pas suffisant pour que l'espace de notre vieil Occident, pourtant plutôt gâté par la nature avec ses paysages aisément habitables et son climat dans l'ensemble tempéré, conserve toutes ses potentialités pour les générations futures.

Au-delà de toutes les questions, qu'elles soient démographique ou écologique,  que pose ce choix d'opérer un transfert de population, il y a aussi deux remarques sur la méthode suivie par les Nations Unies et nos dirigeants.

Il y a d'abord dans cette façon de procéder une logique d'ingénierie appliquée à l'humain qui fait un peu froid dans le dos. La facilité avec laquelle ces grands dirigeants imaginent de transférer des dizaines de millions de personnes sans se soucier plus que ça des arrachements familiaux et des chocs culturels que cela implique est étonnante : pour eux les femmes et les hommes ne sont que des êtres interchangeables ou suffisamment malléables pour être placés ici ou là selon les besoins de nos sociétés. Bien loin du printemps des peuples vécu en Europe au mitan du XIXème siècle ou du savoir anthropologique et ethnologique développé tout au long du XXème siècle, nos dirigeants semblent plutôt s'inscrire dans la pratique des grands déplacements de population mis en œuvre par les régimes totalitaires, même si les méthodes ne sont pas comparables.

Se profile aussi la question du respect des choix du peuple, question difficilement occultable dans un système politique qui se veut démocratique et donc promeut selon la formule d'Abraham Lincoln le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. Or il semble bien que les peuples autochtones, en Italie au Japon en Allemagne en Bulgarie et même en France, aient choisi globalement une décroissance démographique plus ou moins forte. Car l'avenir d'une société ne passe pas seulement par le choix de telle ou telle équipe de gouvernants mais aussi par la somme des choix individuels et familiaux de toute une société. Au nom de quoi des dirigeants s'arrogent-ils le droit de corriger le choix collectif de toute une société en important des populations entières pour compenser un soi-disant manque démographique ? Au nom de la société de croissance qu'ils défendent à tout prix, croyant ainsi contribuer à équilibrer les comptes d'une société qui dans les faits court à sa perte, quand des peuples sentent instinctivement qu'il faut réduire la voilure en étant moins nombreux pour affronter les crises qui s'annoncent ? Ou pour défendre un appétit de pouvoir sur toujours plus de gens ?

Peu importe leurs raisons, ce qu'il faut noter, c'est que le choix d'introduire des millions de personnes dans des sociétés fortement structurées n'a jamais été soumis à une ratification démocratique. Et quand les peuples regimbent, ces mêmes dirigeants utilisent la métaphore de la société fermée sur elle-même, connotée négativement au contraire d'une société ouverte, pour disqualifier tout débat. En clair, refuser l'arrivée de millions de migrants, c'est être d'extrême droite, tout près d'Hitler et du camp du mal.

Avoir pour dirigeants des apprentis-sorciers qui croient piloter une société comme des ingénieurs une machine, le tout en passant allègrement par-dessus le choix des peuples en pratiquant un déni démocratique, c'est aussi comme cela que l'on peut voir le débat sur les migrations de remplacement.

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3 février 2016 3 03 /02 /février /2016 17:24

Un article de Denis Garnier, président de Démographie Responsable

 

La Division de la population des Nations Unies, publiait déja en 2001 un rapport intitulé " Migration de remplacement : est-ce une solution pour les populations en déclin et vieillissantes ? " où l'on pouvait lire : « Le concept de migration de remplacement correspond à la migration internationale dont un pays aurait besoin pour éviter le déclin et le vieillissement de la population qui résultent des taux bas de fécondité et de mortalité.» 

Suivait une argumentation relativement alarmiste : 

« Les projections des Nations Unies indiquent que, entre 1995 et 2050, la population du Japon ainsi que celles de pratiquement tous les pays d’Europe va probablement diminuer. Dans de nombreux cas, comprenant l’Estonie, la Bulgarie et l’Italie, des pays vont perdre entre un quart et un tiers de leur population. Le vieillissement de la population sera généralisé, élevant l’âge médian de la population à des hauts niveaux sans précédents historiques. Par exemple, en Italie, l’âge médian augmentera de 41 ans en 2000 à 53 ans en 2050. Le rapport de support potentiel, c’est-à-dire le nombre de personnes en âge de travailler (15-64 ans) par personne de plus de 65 ans, diminuera souvent de moitié, de 4 à 2. 

C’est l'Italie qui subira la plus grande perte relative de population, moins 28% entre 1995 et 2050. La population de l’Union Européenne qui surpassait celle des Etats-Unis de 105 millions en 1995 lui sera inférieure de 18 millions en 2050.

Pour l'Union Européenne, une continuation des niveaux d’immigration observés dans les années 1990 suffirait à peu près à éviter une diminution de la population totale, tandis que pour l’Europe dans son ensemble, il faudrait deux fois le niveau d’immigration observé dans les années 1990.

La Corée du Sud n’aurait besoin que d’un niveau modeste d’immigration, mais c’est cependant un changement majeur pour un pays qui jusqu’ici était un pays d’émigration. L'Italie et le Japon auraient besoin d’une forte augmentation de leur nombre d'immigrants. Par contre, la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis pourraient conserver leur nombre d’habitants avec moins d'immigrants que ce qu’ils ont reçu dans le passé récent. Les nombres d’immigrants nécessaires pour éviter les déclins de la population en âge de travailler sont plus grands que ceux nécessaires pour éviter les déclins de la population totale.

Si de tels flux d’immigrants se produisaient, les immigrants d’après 1995 et leurs descendants constitueraient une fraction impressionnante de la population totale en 2050 – entre 30 et 39% dans le cas du Japon, de l’Allemagne et de l'Italie. Relativement à la taille de leur population, l'Italie et l’Allemagne auraient besoin du plus grand nombre d’immigrants pour conserver la taille de leurs populations d’âge actif. L'Italie aurait besoin en moyenne chaque année de 6.500 immigrants par million d'habitants et l’Allemagne de 6.000.»

Ce rapport posait de nombreuses questions :

Comment ont fait nos ancêtres pour vivre moins nombreux ? N'ont-ils pas réussi à ce que nous soyons là aujourd'hui ? Ne nous ont-ils pas d'ailleurs transmis une planète en meilleur état que celle que nous allons laisser à nos descendants ?

Au vu des densités de population importantes de certains pays cités : Corée du Sud (507 hab./km²), Japon (336 hab./km²), Allemagne (227 hab./km²), Italie (208 hab./km²) ne serait-il pas judicieux au contraire de laisser ces populations diminuer et d'adapter l'économie à cette situation. L'environnement, et donc les habitants de ces pays, n'en seraient-ils pas les premiers bénéficiaires ?

Mais plus grave : cette injonction à l'accueil de migrants n'est-il pas l'aveu de l'impuissance de la communauté internationale à juguler la l'explosion démographique de nombreux pays du sud, explosion qui conduit à la surpopulation et oblige des dizaines de millions d'individus à s'expatrier au travers de périples dangereux ? 

Ne parlons même pas des réactions négatives d'une partie importante des populations autochtones qui subissent les effets collatéraux de ces arrivées massives (problèmes culturels et religieux, allant parfois même jusqu'au terrorisme). 

Pour aller plus loin :

Un entretien avec Renaud Camus sur Boulevard Voltaire. Voir également sur cette question démographique l’article de Fabien Niezgoda: La bombe P n’est toujours pas désamorcée, (revue Eléments n° 158, janvier-février 2016 p. 76 à 79). Cet article est suivi d’un entretien entre Fabien Niezgoda et Didier Barthès, porte-parole de Démographie Responsable.

_________________________________________________________________________________

Cet article a donné lieu à une suite rédigée par Jean Bruguier intitulée : Discussion suite à l’article de Denis Garnier : Comment ont fait nos ancêtres ?

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1 janvier 2016 5 01 /01 /janvier /2016 07:44

 

Estimation de la population mondiale au 1er janvier 2016

 

(données en millions d'habitants et en début d'année)

Sources                                         2015            2016                  Progression

                                                                                                                    (en nombre)         (en %)

INED                                             7 285            7 367             +  82    soit    + 1,1 % 

US Census Bureau                       7 215            7 296             +  81    soit    + 1,1 %

Population Ref. Bureau                 7 282            7 368            +  86     soit    + 1,2 %

Poodwaddle                                   7 183            7 366            + 183    soit    + 2,5 %

Population Matters                        7 322            7 424            + 102    soit    + 1,4 %

Population mondiale.com              7 269            7 354            +  85     soit    + 1,2 %

Ria Novosti - Sputnik (*)                 7 337            7 443           + 106     soit    + 1,4 %

Terriens.com                                  7 212            7 287            +  75     soit    + 1,0 %

Visio Météo                                    7 207            7 283            +  76     soit    + 1,1 %

Worldometers                                7 285            7 392            + 107     soit    + 1,5 %

 

Moyenne                                       7 260             7 358           + 98      soit   + 1,3 %

 

 

Notre planète compterait donc entre 7,3 et 7,4 milliards d'habitants en ce 1er janvier 2016 selon une moyenne calculée à partir des différents compteurs aujourd'hui disponibles.  

Comme l'an dernier, la progression est de + 98 millions ce qui parait nettement au-dessus des valeurs communément admises; la plupart des analystes tablant plutôt une évolution autour de + 80 millions ou légèrement supérieure. L'INED et l'US Census Bureau, deux organismes de référence, retiennent pour leur part respectivement + 82 et + 81 millions. 

Dans le cas précis du relevé ci-dessus, le compteur Poodwaddle semble avoir sensiblement modifié sa base de calcul. Cela  réhausse évidemment  le niveau moyen de progression mais change très peu le total de la population mondiale. Néanmoins, même cette estimation mise à part, la croissance démographique annuelle s'éleverait encore à + 89 millions et resterait ainsi largement supérieure aux estimations les plus courantes.

Cependant, cette réévéluation à la hausse de nos effectifs comme de leur progression ne relève pas du hasard, elle est en parfaite cohérence avec les réévaluations à long terme récemment réalisées par des centres d'études aussi sérieux que l'ONU ou  l'INED dont nous avons souvent évoqué les travaux sur ce site.

Rappelons que l'INED, dans l'étude  réalisée par Gilles Pison : " Tous les pays du monde "  (revue Population & sociétés ) réhausse régulièrement depuis quelques années ses projections pour 2050.  Elles s'établissaient à 9,4 milliards en 2009,  à 9,6 milliards en 2011, à 9,7 milliards en 2013, et enfin  à 9,8 milliards en 2015. L'ONU est allée dans le même sens, faisant respectivement passer ses prévisions pour 2050 de 9,1 milliards en 2009, à 9,3 milliards en 2011, à 9,6 milliards en 2013 et à 9,7 milliards en 2015. Pour 2100, seule l'ONU établit des projections, mais là aussi elles ont été réévaluées, passant de 10,1 milliards en 2010 à 10,9 milliards en 2013 et  enfin à 11,2 milliards en 2015  (Sur ces réévaluations voir cet article)

Cette estimation au 1er janvier 2016 confirme donc les précédentes et montre  que nous faisons face à  une inflexion de la baisse de la fécondité. Baisse qu'il y a peu encore, certains imaginaient en mesure de stabiliser nos effectifs à l'horizon 2050. Aujourd'hui, l'ONU elle-même, estime (selon son l'hypothèse moyenne de fécondité) que nos effectifs progresseront  jusqu'en 2100 et même sans doute un peu au-delà.

Remarquons d'ailleurs que d'après l'INED la fécondité mondiale moyenne est effectivement stable à 2,5 enfants par femme depuis 2011. Cette stabilité est bien sûr encore trop récente pour valider de manière certaine l'inflexion évoquée, elle va néamoins dans ce sens.

Ces études sont à mettre en relation avec les grands problèmes environnementaux que connaît notre planète. Il est tout à fait extraordinaire que dans ce contexte, la récente COP 21 n'ait pas sérieusement fait référence à la composante démographique. Il s'agit pourtant d'un déterminant fondamental de la pression anthropique dont l'évolution dictera largement celle de la biosphère et aura évidemment une influence toute aussi déterminante sur le climat.  

_________________________________________________________________________________

Via ces liens, vous pourrez  retrouver la série d'articles de ce site :  

 La population mondiale au 1er janvier :

2009 (6,759 milliards), 2010 (6,838 milliards), 2011 (6,914 milliards),

2012 (7,003 milliards), 2013 (7,082 milliards), 2014 (7,162 milliards),

2015 (7,260 milliards), 2016 (7,358 milliards), 2017 (7,440 milliards),

2018 (7,534 milliards), 2019 (7,637 milliards), 2020 (7,703 milliards)

2021 (7,800 milliards), 2022 (7,888 milliards), 2023 (7,984 milliards).

(*) Le compteur de Ria Novosti est cette année remplacé par Sputnik qui est la publication la plus proche et celle sur laquelle renvoie une demande à partir de Ria-Novosti.

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11 novembre 2015 3 11 /11 /novembre /2015 11:44

Alors que les préparatifs de la COP 21 battent leur plein et que l'évènement suscite beaucoup d’attentes, il apparait que l’un des principaux sujet de pression anthropique et notamment d’émission de gaz à effet de serre, à savoir, le nombre des hommes, ne doive pas y être évoqué.

Tabou ? Refus d'envisager le long terme ? Pourtant, à comportement égal les émissions de CO2 sont proportionnelles à nos effectifs et une majorité des habitants de la planète ne peut guère  réduire sensiblement les siennes. Améliorer le niveau de vie des plus pauvres conduira au contraire à augmenter les émissions individuelles.

Alors, peut-on dans ce contexte se contenter d'envisager une action sur les modes de consommation ? Ne doit on pas aussi nvisager une réflexion sur l'évolution de notre nombre et une maîtrise de notre démographie ?  L'ONU vient précisément de réhausser ses projections pour 2050 comme pour 2100 : nous serons plus de 11 milliards à la fin du siècle contre 7,4 ajourd'hui ! La Chine de son côté tente de relancer sa fécondité en mettant fin à la politique de l'enfant unique.

Pour évoquer ces questions, l’association Démographie Responsable organisera à Paris puis à Suresnes les 19 et 21 novembre prochains deux conférences intitulées :

 

La COP21 peut-elle éluder la question démographique ?

 

Jeudi 19 novembre 2015 à 20 h 30 à Paris

Fiap Jean Monet, 30 rue Cabanis, Paris 14ème

 

Avec les interventions de :

- Yves Cochet, ancien ministre de l’environnement,

- Odon Vallet, professeur à Sciences Po

- Roger Martin, président de l’association Population Matters

- Gérard Charollois, président de Convention Vie et Nature

- Denis Garnier, président de Démographie Responsable

 

Attention la conférence de Suresnes annoncée ci-dessous est reportée suite aux récents évènements survenus à Paris

 

Samedi 21 novembre 2015, 14 h 30 à Suresnes (92)

Salle multimédia, place des Courtieux,

 

Avec les interventions de :

Antoine Waechter, président du MEI

Michel Sourrouille, écologiste et malthusien

Denis Garnier, président de Démographie Responsable.

 

Chaque conférence donnera lieu à un débat entre le public et les intervenants.

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31 octobre 2015 6 31 /10 /octobre /2015 07:44

Quel que soit l’avis intéressé des patrons de Disney, la fin de la politique de l’enfant unique en Chine constitue le plus mauvais signe que l’on pouvait recevoir en matière de protection de l’environnement.

A la veille même de la COP21, cette décision montre que le pays le plus peuplé au monde n’intègre absolument pas le facteur démographique comme élément de la destruction systématique de la planète par notre espèce. Ici en France, la quasi-absence de dénonciation de cette mesure ne fait que renforcer ce sentiment. Les hommes pensent qu’être toujours plus nombreux est une richesse et rien, ni la pollution, ni la disparition de la moitié des espèces sauvages en 50 ans, ni la multiplication des mégalopoles ne semble devoir leur ouvrir les yeux.

Certains arguent que cette décision ne changera pas grand-chose pour une double raison.

D’une part la politique de l’enfant unique n’était ni généralisée ni totalement respectée, la naissance d’une fille en tant que premier enfant donnait lieu à des exemptions, les campagnes bénéficiaient parfois d’une législation adoucie et de nombreuses minorités pouvaient avoir plus d’un enfant (la fécondité en Chine s'établit déjà à 1,7 enfant par femme). D’autre part et surtout, les chinois se sont désormais installés dans un modèle d’enfant unique, sur le plan culturel comme sur le plan économique. Même en l’absence de pénalité pour la seconde naissance, l’enfant unique restera intéressant économiquement (à cause du coût de l'éducation notamment) et restera valorisé du point de vue culturel, les mentalités évoluant lentement. La situation ne devrait donc pas changer du tout au tout. Peut-être, toutefois la décision n’a pas été prise au hasard et l’on peut compter sur un pays aussi dirigiste que la Chine pour influencer les évènements.

On estime parfois que les politiques natalistes ou antinatalistes ne servent à rien, comme si les dirigeants les prenaient pour faire plaisir.  Or, justement la politique inverse avait bien fonctionné, évitant selon les différentes estimations entre 400 et 500 millions de naissances au cours des dernières décennies. Aurait-elle donné de trop bons résultats au point que la Chine, effrayée, veuille aujourd’hui amortir le phénomène par peur d'une forme de déplétion humaine trop brutale ? En tout cas, qu’aurait fait la Chine de toutes ces bouches à nourrir ? Aurait-elle connu un développement économique aussi faramineux ? C’est bien improbable compte tenu des charges (éducation, logement…) que cela aurait engendré.

Mais il existe encore un autre motif d’inquiétude, ce sont les raisons qui sont avancées : Lutter contre le vieillissement de la population ! Or il n’y a pas pire raison que celle-ci, car elle marque une très mauvaise appréhension des phénomènes démographiques à long terme. Rappelons cette vérité toute simple : Le temps s’écoule et aucun régime politique n’y pourra rien. Aussi tous les jeunes d’aujourd’hui seront les vieux de demain (à moins que de modernes Lyssenko  ne veuillent soumettre les lois de la nature à la "bienpensance" politique). Ainsi, le nombre et la proportion importante de personnes âgées aujourd’hui, et plus encore dans les années à venir, en France comme en Europe, résultent et résulteront directement du baby-boom des années 1950 et 1960. Il en sera de même en Chine dans 60 ans, les naissances supplémentaires attendues demain  se transformeront après-demain en vieillards excédentaires.

Que ferons-nous ? Que ferons les chinois ? Quelle vie, quelles ressources auront à leur disposition ces personnes déjà fragilisées par la vieillesse ? Faudra-il alors imposer la famille de 4 enfants et faire des milliards de nourrissons pour maintenir à toute force l’âge moyen de la population en dessous d’un certain seuil ? On voit bien qu'il s'agit d'entrer là dans un cercle vicieux où la société ne semble devoir trouver son équilibre que si chaque génération est plus nombreuse que la précédente. Dans un monde fini (et il l’est !) c’est évidemment une folie. Dans le domaine de la finance cela s’appelle une pyramide de Ponzi et se termine toujours très mal.

A plus court terme même, un rehaussement de la natalité chinoise pourrait se traduire par une véritable catastrophe sociale. Peut-on raisonnablement faire le pari que, 50 ans durant, la Chine connaitra une croissance économique toujours aussi aussi forte. Si la natalité remonte, dans 20 ans ce sont des classes d’âges plus nombreuses qui se présenteront sur le marché du travail, si à ce moment-là, la Chine connait la moindre récession c’est par dizaines et sans doute par centaines de millions que se compteront les chômeurs ? L’ampleur du pays fera l’ampleur de la catastrophe. Or justement, il est fort probable que dans 20 ans le monde se heurte de plein fouet aux effets de la déplétion pétrolière. Le pari est pour le moins risqué et la nature bien peu prise en compte. Ces éventuelles naissances supplémentaires donneront des habitants qui devront être logés, qui devront consommer, circuler... bref, présenter une empreinte écologique pour une part proportionelle à leurs effectifs.

Le vieillissement de la population est inéluctable, c'est d'ailleurs un excellent signe, nous profitons de la vie plus longtemps, c'est une folie de vouloir le repousser par une fuite en avant. Il adviendra quoiqu'il arrive.  Plus nous le repoussons, plus il se produira sur des effectifs nombreux et plus difficiles à gérer.

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14 septembre 2015 1 14 /09 /septembre /2015 06:44

Après que l’ONU a publié fin juillet ses nouvelles estimations sur l’évolution de la population mondiale, c’est désormais au tour de l’INED, via la revue Populations & Sociétés, d’offrir un panorama de la démographie planétaire et de proposer ses propres projections pour 2050.

Cette étude, éditée tous les deux ans sous la plume de Gilles Pison (1), permet d’établir un comparatif régulier et de voir comment évoluent, non seulement la population, mais également nos anticipations sur celle-ci. Pas de surprise bien sûr, l'ONU et l'INED parviennent à des résultats très semblables.

Voici les principales données, les estimations sont fournies pour la mi-année. Sources : document cité ci-dessus et versions précédentes

 

Population globale (en millions)

 

                                 2005        2007      2009         2011      2013       2015

 

Afrique                      906            944       999       1 051       1 101     1 171 

Amérique                  888           904        920          942          958        987

Asie                        3 921        4 010     4 117       4 216      4 305     4 397

Europe                      730           733        738          740         740        742

Océanie                      33             34          36            37           38          40

Total Monde          6 477        6 625     6 810       6 987     7 143     7 336

 

On peut déduire de ces chiffres l’évolution du taux de croissance mondial :

De 2005 à 2007  + 148 millions d’habitants soit + 74 par an ou + 1,1 %

De 2007 à 2009  + 185 millions d’habitants soit + 92 par an ou + 1,5 %

De 2009 à 2011  + 177 millions d’habitants soit + 88 par an ou + 1,3 %  

De 2011 à 2013  + 156 millions d’habitants soit + 78 par an ou + 1,1 %

De 2013 à 2015  + 193 millions d’habitants soit + 96 par an ou + 1,4 %

 

  Evolution des taux de fécondité (indice synthétique de fécondité)

 

                              2005        2007       2009      2011     2013      2015

 

Afrique                     5,1           5,0         4,8        4,7         4,8        4,7

Amérique                 2,4           2,2         2,2        2,1         2,1        2,0

Asie                         2,5           2,4         2,3        2,2         2,2         2,2

Europe                    1,4           1,5         1,5        1,6         1,6         1,6

Océanie                  2,1           2,1         2,5        2,5         2,4         2,5

Total monde          2,7           2,7         2,6        2,5         2,5         2,5

 

Evolution des projections pour 2050

 

Etude INED 2009 : 9,4 milliards,  rappel projections de l’ONU : 9,1 milliards

Etude INED 2011 : 9,6 milliards,  rappel projections de l’ONU : 9,3 milliards

Etude INED 2013 : 9,7 milliards,  rappel projections de l’ONU : 9,6 milliards

Etude INED 2015 : 9,8 milliards,  rappel projections de l’ONU : 9,7 milliards

 

Sans surprise, se confirme donc la montée de l’Afrique comme futur géant démographique puisqu’avec un taux de fécondité de 4,7 (en baisse légère, il était de 4,8 en 2013), ce continent devrait, au cours de cette première moitié de siècle, passer d’à peine plus de 800 millions d’habitants à presque 2,5 milliards soit une multiplication par 3 en cinquante ans ! La transition démographique tarde à s’y établir. Les taux de fécondité en Afrique du Nord restent élevés alors qu’on attendait dans ces régions une convergence avec la situation de l’Occident développé. Ces taux augmentent même spectaculairement en Egypte atteignant 3,5 enfants par femme (3,0 en  2013 et 2,9 en 2011), il s’agit en outre du pays le plus peuplé de la région en nombre (89 millions) comme en densité si on la ramène à la surface habitable. Le Niger conserve son record de fécondité avec 7,6 enfants par femme !  Rare bonne nouvelle en Afrique, le Nigéria voit son estimation redescendre pour 2050 de 444 à 397 millions (il va de soi toutefois que ces chiffres doivent être pris avec prudence, les statistiques et moins encore les projections ne pouvant être considérées comme excessivement précises dans ce pays où des rectifications ont déja été nécessaires en la matière).

L’Asie, qui reste le continent le plus peuplé (4,4 milliards), ne parvient pas à faire baisser sa fécondité (2,2) et devrait encore gagner un milliard d’habitants d’ici 2050. Il se confirme que l’Inde (1,3 milliards d’habitants et 2,3 de fécondité) dépassera bientôt la Chine, - un peu moins de 1,4 milliard - qui, exemple remarquable, avec une fécondité de 1,7 devrait connaitre d’ici 2050 une stabilisation de sa population, et même peut-être une très légère régression.

En Europe, la France partage avec l’Irlande (mais sur une autre échelle évidemment) le record de fécondité (2,0). Les estimations pour 2050 donnent 72 millions d’habitants sur le territoire métropolitain. La fécondité globale du continent (1,6) reste inférieure au seuil de renouvellement des générations mais l’Europe, bien sûr, reste un territoire d’immigration.

De son côté, l’Amérique devrait encore gagner 230 millions d’habitants d’ici la moitié du siècle et atteindre 1,2 milliard. Notons que les Etats-Unis gardent un taux de fécondité élevé (1,9) pour un pays développé; c’est une constante qui les différencie de l’Europe. La projection globale pour l’ensemble du continent est en légère diminution par rapport à celle de 2013, sauf pour le Mexique pour qui l'estimation pour 2050 a été relevée de 150 à 164 millions, la fécondité y ayant d’ailleurs été revue à la hausse.

Sur le monde entier, il semble que la baisse de la fécondité marque une pause à  2,5 par femme maintenant depuis 4 ans . Pause qui pourrait expliquer la hausse des projections puisque, rappelons que ces projections anticipent une baisse sensible de la fécondité (si ce n’était pas le cas, la population exploserait littéralement).

Il est difficile de tirer des conclusions des chiffres de l'augmentation annuelle de nos effectifs mondiaux. La forte variabilité de la croissance sur ces périodes (de + 148 à + 193 millions d’habitants sur deux ans) s’explique sans doute par une relative incertitude sur les chiffres globaux de la population. Les démographes eux-mêmes ne prétendent pas à une précision meilleure que 1 % sur les données globales.

Concernant les projections, on note d’après l'INED comme d'après l'ONU une hausse sensible des effectifs attendus et le chiffre de 10 milliards de terriens qu'il y a 15 ans encore, on imaginait pour la fin du siècle ne semble pas devoir être loin d’être atteint dès 2050 (9,7 selon l’ONU, 9,8 selon l’Ined). Cette hausse conjointe et régulière du niveau des projections de la part de deux des sources démographiques parmi les plus sérieuses et les plus fiables devrait conduire à une certaine inquiétude de la part des démographes. Cela n'est que très moyennement le cas, et certainement pas suffisamment pour attirer l’attention des écologistes sur la question, puisque la prochaine conférence sur le climat - la COP21 - semble devoir quasiment faire silence sur le facteur démographique.

(1) Gilles Pison : Population & Sociétés,  Tous les pays du monde 2015 (INED)

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