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24 novembre 2024 7 24 /11 /novembre /2024 09:24

 

Illustration : Un parc photovoltaïque à Latieule (Lozère) en lieu et place de 19 hectares de forêt.

Un article de Bruno Ladsous

La course au solaire est devenu un problème en France. 

Parfois les contempteurs (à raison) de l’éolien sont portés à porter un regard plus indulgent sur le photovoltaïque. Il est vrai que celui-ci est moins invasif, tant par son rapport d’échelle (maximum 3 m de hauteur) que par ses nuisances sonores (inexistantes) ou visuelles (pas d’effet stroboscopique).

Pourtant, selon un avis du 19 juin 2024 émis par le très sérieux et compétent Conseil National de Protection de la Nature (CNPN), le photovoltaïque industriel est un danger pour la biodiversité, car en détruisant les écosystèmes préexistants, les centrales photovoltaïques ont pour effets :

 • une perte d’habitat de nidification et d’alimentation pour les oiseaux

 • la disparition d’arbres utilisés par les chauves-souris pour se reproduire, hiberner ou chasser

 • un appauvrissement de la flore ‒ tant en quantité qu’en diversité ‒ et des insectes pollinisateurs qui y sont associés,

 • la mortalité de la petite faune qui s’y trouve lors des travaux, en particulier les reptiles et les amphibiens en phase terrestre

 • la constitution de pièges pour les insectes polarotactiques

 • parfois aussi des collisions avec les oiseaux et les chiroptères,

 • des ruptures de continuités écologiques pour les mammifères, du fait des clôtures de protection.

Le CNPN formule alors 21 recommandations dont la première et d’urgence est de « mettre un terme à l’implantation de centrales photovoltaïques au sol dans les aires protégées et les espaces semi-naturels, naturels et forestiers »... Du bons sens.

Il esquisse ensuite un plan de développement organisé et rationnel du photovoltaïque en France qui pourrait respecter l'environnement et de la biodiversité. Spécifiquement sur l'agrivoltaïsme, il demande qu'on s'assure que « les projets ne se fassent pas au détriment d’une agriculture agro- écologique diversifiée ni au détriment de la biodiversité sauvage ».

Il recommande en tout état de cause qu’une priorité soit donnée au photovoltaïque en zones déjà artificialisées, en particulier sur les bâtiments et les parkings et près des zones densément peuplées afin de rapprocher zones de production et zones de consommation, et d'éviter ainsi la multiplication coûteuse des raccordements et renforcements de réseaux. Ici encore, rien que du bon sens, de nature à responsabiliser les habitants des villes en les amenant à produire une partie de l’énergie dont ils ont besoin.

Au plan " technique ", il propose que les installations au sol à venir soient soumises à la réglementation des Installations Classées pour la Protection de l'Environnement (ICPE) compte tenu de leurs impacts sur la nature, ainsi qu’à la législation sur la dérogation espèces protégées en raison de la modification significative des conditions d’habitats pour les espèces protégées qu'elles induisent. 

On le voit bien, l'avenir du photovoltaïque ce sont :

 - le solaire sur toiture :

Des projets, essentiellement privés, qui en France ont un potentiel supérieur à 100 GW :

- thermique pour l'eau chaude sanitaire et le chauffage

- électricité, idéalement en autoconsommation

 - les sols déjà artificialisés :

Ils ont un potentiel de 49 GW selon l'ADEME dans son recensement de 2019 :

 - les friches industrielles et commerciales : compte tenu des coûts élevés de leur dépollution, on peut raisonnablement considérer qu'elles peuvent être utilisées pour de la production solaire

 - les délaissés routiers et ferroviaires : terres hyper-tassées, bétonnées ou bitumées, ici encore, on peut les utiliser pour de la production solaire.

- les ombrières de parkings : 4 GW selon l'ADEME

On observera que ces 100 + 49 + 4 : 153 GW sont très au-dessus de l'objectif affiché à Belfort le 10 février 2022 par le Président de la République : 100 GW en 2050. 

La frénésie actuelle des opérateurs est donc totalement non proportionnée à la réalité des objectifs officiels.

Vous avez dit " décarboner " ?

Le solaire ne décarbone pas autant que ce que l'on croit généralement, sauf lorsqu'il se substitue à une source fossile telle qu'une chaudière à fuel ou même à gaz.

Ce pour trois raisons superbement décrites par Jean-Marc Jancovici (à écouter ici ):

 - le Photovoltaïque est à 40-45 g eq. CO2 par KWh, à comparer au nucléaire 4 à 6 g, l'hydrauliques 10 g et même à l'éolien à 12-15 g.

 - sous le vecteur électrique il est intermittent, et nécessite un complément qui, le plus souvent, est du gaz à 418 g. Sous le vecteur thermique par contre, la chaleur fabriquée peut être stockée.

 - les panneaux sont désormais quasi-tous fabriqués en Chine, puis transportés par voie maritime, ce qui augmente considérablement leur empreinte carbone.

Ainsi, la marche forcée au solaire est une hérésie au plan environnemental et protection de la nature, et cela ne décarbone pas tant que cela notre pays. 

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7 janvier 2023 6 07 /01 /janvier /2023 17:04

 

Les Écologistes et le nucléaire

Pourquoi j'accepte aujourd'hui le nucléaire

par Antoine Waechter

12 avril 1971, Fessenheim

La première manifestation contre le projet de centrale nucléaire à Fessenheim réunit 1 500 personnes à l’appel du Comité pour la sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin (CSFR : Jean-Jacques Rettig, président), de la fédération haut-rhinoise des associations de protection de la nature (AFRPN 68 : Antoine Waechter, président, Solange Fernex, secrétaire) ainsi que de Bürger Initiative allemands. C’est la première manifestation contre le nucléaire civil en France. 5 000 personnes manifestent une nouvelle fois en 1972. Au-delà des slogans, trois motivations mobilisent les manifestants : la peur d’une pollution radioactive, le refus d’une destruction des milieux rhénans par une industrialisation nucléarisée (Fessenheim était la première annoncée d’un ensemble de quatre centrales envisagées sur le fleuve), et la dénonciation d’un État centralisé et autocratique. En 1972, nous diffusons aux manifestants, sous le sigle de l’AFRPN, un texte affirmant qu’il serait absurde de refuser la production électronucléaire si nous ne remettons pas en cause la croissance de la consommation d’électricité de 10 % par an prévue par EDF. Nous plaçons d’entrée de jeu la modération de la consommation d’énergie au cœur du combat.

La création de la synonymie : antinucléaire = écologistes

Dans les années qui suivent, l’antinucléaire prend de l’ampleur, jusqu’à la confrontation tragique de Malville, en 1977. La mobilisation, reprise par une certaine Gauche, s’assimile à une contestation de l’État. Dans le même temps, la simplification médiatique associe les termes d’écologistes et d’antinucléaires : les antinucléaires sont nécessairement des écologistes, et ces derniers sont nécessairement opposés au nucléaire. Cette confusion d’identité va peser lourd dans la suite.

La formation d’une pensée dogmatique

J’ai combattu le nucléaire pendant trente ans, d’abord au nom d’Écologie et Survie (1973-1984), puis des Verts (1984-1994) et enfin des Écologistes-MEI (1995-2004). Je me suis rendu compte que les motivations fortes des premières années ont progressivement laissé la place à une posture idéologique. Les arguments avancés autour de moi avaient des racines de plus en plus faibles. Le refus du nucléaire est devenu une revendication d’identité politique. L’analyse rationnelle a disparu. Le fait de s’affirmer contre le nucléaire s’auto-justifie par un demi-siècle d’opposition. La position antinucléaire est aujourd’hui le dogme d’une identité d’écologiste.

Avions-nous raison de nous opposer au nucléaire ?

Oui, sans hésitation : raison de nous opposer à Fessenheim : l’Histoire nous a donné raison, et nous avons sauvé les milliers d’hectares de forêts rhénane promises au défrichement et à l’industrialisation ; raison de contester une énergie dangereuse : sous notre pression, la France a mis en place le système garantissant la sécurité de la filière le plus performant du Monde. Nous avons rempli notre rôle.

Mais, les temps ont changé

La menace climatique s’est aujourd’hui imposée comme le premier danger pour l’Humanité, exigeant de réduire de manière substantielle notre recours aux énergies fossiles. En 2004, Jean Brière, un antinucléaire lyonnais de la première heure, nous interpelle : vous devez choisir entre une menace avérée, le réchauffement climatique, et un risque potentiel, le nucléaire. La France a aujourd’hui l’un des mix énergétiques les plus vertueux au monde au regard des émissions de carbone : voulez-vous le remettre en cause ? Nous avons alors adopté une position répondant à ceux qu’effraie le climat et à ceux qui refusent le nucléaire : nous fermerons un réacteur à chaque fois que nous aurons obtenu une baisse équivalente de la consommation d’électricité. Dix-huit ans plus tard, nous sommes obligés de constater que l’électrification de la mobilité individuelle et la communication numérique font grimper la consommation et qu’à ce rythme nous ne pourrons fermer aucun réacteur. Notre société se comporte aujourd’hui comme un drogué en manque : elle est prête à tout sacrifier pour avoir son contingent de kWh : prête à sacrifier la beauté de la France, en dispersant des milliers de zones industrielles dédiées au vent dans l’espace rural ; à sacrifier les écosystèmes, en plantant des éoliennes et des parcs photovoltaïques dans les forêts ; à massacrer des espèces vulnérables (chauves-souris, grands rapaces…) ; à colorer les toitures en blanc au détriment de la cohérence esthétique de nos villages ; en enlever aux citoyens tout pouvoir de contrôle sur l’évolution de leur cadre de vie. Avec la complicité active des antinucléaires dogmatiques !

Les critiques adressées au nucléaire ne justifient pas une opposition, mais des exigences

- L’approvisionnement en combustible

Oui, l’extraction de l’uranium à ciel ouvert en Afrique a un impact environnemental et social incontestable. Remarquons que l’extraction du néodyme, indispensable aux éoliennes, à un impact encore plus douloureux en Mongolie. Et l’extraction du lithium nécessaire aux batteries de nos voitures électriques, sera une plaie béante de plus, bientôt en France.

- La gestion des déchets

Les déchets chimiques stockés dans une mine (Stocamine) du bassin potassique du Haut-Rhin, dont l’extraction est demandée par des militants et de nombreux élus, nous rappellent que le nucléaire n’a pas le monopole du problème. J’ai affirmé, voici trente ans déjà, que la formule des Scandinaves me paraît être la meilleure : enfouir définitivement les déchets les plus radioactifs dans une fosse d’un kilomètre de profondeur creusée dans le granit, une roche naturellement radioactive. Bure reste un site expérimental, qui n’héberge actuellement aucun déchet.

- L’accident possible

Deux accidents majeurs en un demi-siècle, soit une fréquence inférieure aux accidents de la chimie et aucune comparaison avec le nombre de morts des unités industrielles non nucléaires. Le nucléaire, c’est le pari de Pascal inversé : une probabilité d’occurrence infime, mais des effets considérables lorsque l’événement se produit. A Tchernobyl, l’accident met en cause le système hiérarchisé autocratique du régime communiste et une conception technique défaillante qui n’est reprise par aucun des réacteurs actuellement en service dans le monde. De cet événement, nous retenons que le nucléaire civil ne peut raisonnablement être développé que dans des pays capables de garantir la sécurité des installations, affectés d’un faible taux de corruption, et soumis au contrôle démocratique des citoyens. En d’autres termes, le nucléaire ne peut pas remplacer le charbon dans une grande partie de la planète. A Fukushima, l’accident met en cause les planificateurs, qui ont sous-estimé la puissance possible des tsunamis. À la Faute sur Mer, qui doit-on accuser : l’incapacité des maisons à résister à l’océan, ou l’irresponsabilité d’une municipalité qui a ouvert le bord de mer à l’urbanisation ? Et comme l’exprime Jean-Marc Jancovici : à Fukushima, l’attention s’est focalisée sur la centrale, qui n’a tué personne, alors que le tsunami a fait des milliers de victimes. À Fessenheim, la centrale a été fermée par précaution et surtout pour éviter une dépense exorbitante sur une centrale vieillissante. La commission en charge de la sécurité nucléaire veille, avec une rigueur sans commune mesure avec la surveillance de nos sites industriels.

La faiblesse des énergies renouvelables

Le renouvelable n’est pas une valeur morale, il n’est même pas écologiquement vertueux. Toutes les productions d’énergies ont un impact, à l’exception de celle que l’on ne consomme pas, mais certaines sont plus favorables que d’autres. Les éoliennes industrielles terrestres cumulent le plus d’inconvénients (voir « Le scandale éolien »). Le développement du photovoltaïque au détriment de la forêt est un contre-sens, et le détournement des terres agricoles au profit de la production d’énergie est un « crime » contre le bon sens. Mais, la faiblesse de la majorité des renouvelables est qu’elles sont diffuses. La centrale du Bugey (4 réacteurs de 900 MW), par exemple, est déployée dans un espace clos de 85 hectares. Un parc éolien d’une puissance installée équivalente exigerait de couvrir un territoire de 7 200 hectares par 1 800 mâts de 2 MW ! Pour une production annuelle trois fois moindre (taux de charge : 22 % pour l’éolien, 80 % pour le nucléaire). Voilà pourquoi, la contribution de l’éolien à la production française oscille, selon les jours, entre 0 (pas de vent) et 18 % (en pointe), avec une moyenne de 6,9 %.

Pragmatisme

Les centrales sont installées. Elles nous valent le mix énergétique le plus décarboné du monde. L’introduction des éoliennes dans ce mix dégrade cette performance, en sus des dégâts multiformes qu’elles occasionnent. Toute personne consciente de la menace climatique acceptera, par pragmatisme, le parc électronucléaire installé. Mais, il faut avoir conscience que seule une remise en cause de nos excès consuméristes pour atteindre la sobriété énergétique, évitera l’impasse, comme nous l’écrivions il y a déjà un demi-siècle et comme le modélisait le MIT (1972).

9 décembre 2022

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18 octobre 2022 2 18 /10 /octobre /2022 12:44

En ces périodes de crises écologiques et énergétiques, les énergies dites renouvelables ont le vent en poupe et ont généralement bonne presse au sein des milieux écologistes. Le gouvernement lui-même souhaite en accélérer la mise en oeuvre à travers un récent projet de loi. Les choses ne sont pourtant pas si simples et le Mouvement Écologiste Indépendant propose une critique de ce projet de loi qui  menace les paysages et les espaces naturels

Vous trouverez ci-dessous un résumé d'une étude menée par Bruno Ladsous, Christophe Normier et Antoine Waechter. Bruno Ladsous et Christophe Normier travaillent notamment pour le  Cérémé  (Cercle d' Etudes des Réalités Economiques et du Mix Énergétique).

_____________________

Le projet de loi dit d’accélération des énergies renouvelables déposé au Sénat est révélateur de la fébrilité de notre gouvernement face au risque de ralentissement économique que provoqueraient une pénurie d’énergie et le renchérissement du prix de l’électricité.

On y trouve pêle-mêle pour créer un sentiment d’urgence : le changement climatique, la guerre en Ukraine, les lourdeurs administratives et contentieuses. On y évoque une planète vivable en oubliant de préciser qu’elle doit être vivable pour toutes et tous. Pourtant, l’état de la planète devrait plutôt inviter le gouvernement à prendre des mesures de ralentissement de la prédation anthropique, des mesures de sobriété énergétique et de renforcement de l’efficacité énergétique.

En réalité, ce projet de loi ignore la Charte de l’Environnement et la décision du Conseil Constitutionnel du 12 août 2022 rappelant la primauté de l’environnement et de la santé.

 

I- Cinq oublis essentiels :

1. La France est responsable de 0,95% des émissions Monde de GES, mais de 2% en incluant les produits consommés en France mais fabriqués à l’étranger.

2. Aucune évaluation des besoins en électricité entre 2022 et 2050, aucune courbe prévisionnelle.

3. Aucune référence à l'existence d'alternatives sérieuses, qui ont vocation à être portées au débat public.

4. Aucune mention des solutions en circuit court ne faisant pas appel à d’immenses réseaux de raccordement, ni aux solutions de captage du carbone.

5. Aucune évaluation environnementale, pourtant exigée par les directives européennes. Le document de 193 pages intitulé Etude d'impact n’a rien à voir avec la protection de l’environnement.

 

II- Quatre affirmations non fondées :

1. Les productions d’origine renouvelable seraient les moins coûteuses. Mais c’est complètement faux comme le prouvent des études non contestées qui ont en outre le mérite de tenir compte des Coûts système et des coûts environnementaux (voir ce lien).

2. Les EnR seraient un choix écologique. Mais les électricités renouvelables intermittentes ne contribuent pas à décarboner l’électricité (déjà décarbonée à 92%). Et elles ont un impact environnemental qui n'est plus accepté (paysages et patrimoine, biodiversité, cadre de vie).

3. La France serait en retard. Mais la France respecte, du moins pour son électricité, ses engagements climatiques. Sont par contre en retard les pays qui ont investi massivement dans les EnR, dont l’intermittence est palliée par une production d'origine fossile : gaz, voire charbon comme en Allemagne.

4. Les procédures applicables seraient trop lourdes. Mais la qualité d’une procédure se mesure au niveau de protection des intérêts prioritaires que sont l'environnement et la santé publique, ainsi qu’à la participation des citoyens dans la prise de décision selon la convention d’Aarhus, que la France a ratifiée.

 

III- Quels sont les problèmes que posent les articles du projet déposé :

Le gouvernement a fait machine arrière sur de nombreuses dispositions qui visiblement étaient la « commande » de la filière des EnR (relèvement des seuils de soumission à l'évaluation environnementale, et diverses dérogations de procédure contraires à la convention d’Aarhus), mais il demeure dans le texte proposé de nombreuses dispositions inacceptables pour une protection durable de l’environnement, citons-en quatre :

a, Simplification des procédures pour le développement du photovoltaïque sur les terres agricoles, pastorales ou forestières.

Mais le gouvernement oublie que l’ADEME a recensé en 2019 un potentiel solaire de 49 GW sur des sols déjà artificialisés et malheureusement non renaturables (friches industrielles, délaissés routiers et ferroviaires, anciennes carrières).

b, Reconnaissance aux EnR d'un intérêt public majeur permettant de déroger à l’obligation de respect des espèces protégées.

Mais on peine à comprendre pourquoi des énergies qui ne décarbonent pas, qui ne sont pas compétitives, qui ne contribuent pas à la sécurité d’approvisionnement de nos concitoyens et de leurs entreprises, et qui enfin ne respectent pas, ou si peu, l’environnement, pourquoi et comment elles pourraient être d’intérêt public majeur. C’est tout simplement absurde.

c, Simplification des procédures applicables à l'éolien en mer.

Mais le texte ne montre aucun souci de prévention des impacts sur les milieux marins et sur la ressource halieutique, et il ne fait aucune référence à la résolution protectrice votée par le Parlement européen le 7 juillet 2021.

d, Réduction des factures des ménages résidents proches d’éoliennes, afin de faciliter leur acceptation.

L’Etat peut-il acheter la complaisance des « ménages résidents proches » au détriment de la beauté du monde, au détriment de la biodiversité, ou des riverains ? Où est l’éthique ?

Les Écologistes tiennent à rappeler la décision du Conseil Constitutionnel du 12 août 2022 " la préservation de l’environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation " et " les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins

La société se comporterait-elle comme un drogué prêt à faire n’importe quoi pour avoir sa dose ?  Notre société serait-elle à ce point dépendante de l’électricité qu’elle serait prête à sacrifier ce qu’elle s’est évertuée à préserver depuis un demi-siècle, depuis la première Loi de protection de la nature de juillet 1976 ?

  • Nous demandons de placer l’urgence et les moyens financiers de notre pays dans la recherche de la sobriété et des moyens de diminuer le recours aux énergies fossiles et de réduire notre consommation d’électricité.

    Bruno Ladsous - Christophe Normier - Antoine Waechter

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2 septembre 2018 7 02 /09 /septembre /2018 10:04

Un article d'Antoine Waechter

Le développement de l’éolien terrestre repose sur une escroquerie intellectuelle et politique

Après avoir colonisé les champs de betteraves et de céréales de la Picardie et de la Champagne, les aérogénérateurs investissent dorénavant les reliefs boisés de la basse montagne, dénaturant les plus beaux territoires de France et dégradant l’environnement de dizaines de milliers de personnes.

L’énergie éolienne a, semble-t-il, la sympathie d’une petite majorité de nos concitoyens, mais suscite des dizaines de procès devant la juridiction administrative. Cette réalité contrastée oppose ceux qui ne connaissent que les photographies de pales blanches sur un fond de ciel bleu à ceux qui vivent la proximité de ces monstres technologiques. L’adhésion repose sur une double escroquerie intellectuelle et politique : l’éolien serait nécessaire pour se passer du nucléaire et pour limiter les gaz à effet de serre, plus largement l’avenir appartiendrait aux énergies renouvelables.

Au niveau actuel de consommation énergétique, le renouvelable est parfaitement incapable de remplacer les énergies à haute densité comme le pétrole et l’atome. Il serait nécessaire d’abîmer tous les cours d’eau, de piller la forêt et de couvrir la France de panneaux solaires et de mâts géants pour atteindre cet objectif. Le cœur de la transition énergétique ne peut raisonnablement être qu’une réduction radicale de la consommation : tous les connaisseurs en conviennent. L’escroquerie politique est de taire cette vérité. L’investissement dans les nouvelles technologies de production d’électricité en veillant à ne rien changer à nos modes de vie et à notre organisation socio-économique consiste à poursuivre le modèle de développement à l’œuvre depuis près de deux siècles. C’est plus confortable politiquement… et nous achemine vers l’impasse en toute bonne conscience.

L’éolien n’est pas une alternative au nucléaire. La loi de transition énergétique a inscrit dans le marbre le niveau de production actuelle. L’EPR de Flamanville, qui aura coûté plus de 10 milliards d’euros, est annoncé pour une durée de vie d’au moins 60 ans. Un Etat qui a décidé de sortir du nucléaire n’équipe pas le pays en centrales pour le prochain demi-siècle. La réduction promise de la part de l’atome n’est qu’une illusion d’optique : l’accroissement de la consommation d’électricité, voulu par la loi (notamment par une électrification du parc automobile), conduit mécaniquement à diminuer la part relative sans avoir à modifier la trajectoire du modèle.

Enfin, l’éolien n’a pas sa place dans un mix énergétique dominé par le nucléaire. Une énergie aléatoire suppose des relais rapidement mis en œuvre, comme des centrales hydroélectriques ou des centrales thermiques. L’hydroélectricité étant à peu près totalement mobilisée, le développement des centrales au gaz est le corolaire obligé de l’éolien. En d’autres termes, le développement de l’éolien exige le développement conjoint de centrales mobilisant des énergies fossiles et ne constitue pas, en soi, une réponse à la dérive climatique. L’Allemagne, qui est en voie de fermer toutes ses centrales nucléaires, est aujourd’hui l’un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre de l’Union européenne.

 

Des milliers de personnes en souffrance

La multiplication des parcs éoliens massacre les paysages de France et provoque la souffrance de milliers de personnes. La course aux autorisations d’implanter conduit à coloniser des territoires sans vent comme l’Est du pays, hier considérés comme inaptes aux éoliennes. Pour atteindre la rentabilité, les développeurs installent dorénavant des engins de 200 mètres de haut (pâles + mât), soit 4 à 6 fois plus que les objets déjà existants comme les clochers, les flèches de cathédrale, les pylônes de lignes très haute tension…

De grands voiliers, comme les rapaces, sont tués par les pales, tandis les poumons des chauves-souris éclatent sous l’effet de la dépression d’air créés par leur mouvement. Chaque éolienne vide un espace d’environ 1,8 hectare de tout vertébré (oiseaux et mammifères notamment), soit 9 hectares par parc de 5 machines, ce qui est sans incidence majeure dans un champ de maïs, mais très impactant au-dessus d’une forêt.

L’Académie de médecine a recensé tous les troubles suscités par la proximité d’un aérogénérateur, dans un rapport très complet publié en juillet 2017 : création de conditions favorables aux crises d’épilepsie, effet stroboscopique lié à l’ombre portée des pâles sur les maisons, malaises liées aux ultrasons produits par les vibrations des mâts, nuisances sonores. Le bruit du puissant brassage d’air (la prévision des zones de nuisances est complexe) fatigue le système nerveux par sa permanence comme la goutte d’eau qui tombe des heures durant. La nuit noire étoilée est rompue par les flashs rouges qui signalent les mâts aux avions : impossible de retrouver le charme d’un dîner en plein-air par une nuit douce d’été lorsque ces éclairs lumineux vous rappellent en permanence la présence de cette zone industrielle dédiée au vent.

 

Le scandale de l’Etat complice

Le scandale tient au fait que l’Etat a livré le pays aux spéculateurs du vent. Vous devez déposer un permis de construire pour édifier une maisonnette de 20 m² de surface habitable et d’une hauteur de 2,5 mètres. L’installation d’un aérogénérateur de 200 mètres de haut assis sur un bloc de béton de 75 tonnes et 200 m² de surface est exonérée de permis de construire ! L’implantation n’est soumise à aucune planification : les zones de développement éolien, déjà peu démocratiques dans leur élaboration, ont été supprimées en 2015. La décision du Sénat d’imposer une distance minimale de 1000 mètres entre une éolienne et une habitation a été annulée par le Gouvernement Vals. La Bavière vient d’instaurer une distance égale à 10 fois la hauteur de la machine, soit 2000 mètres pour une hauteur de 200 mètres ; l’Académie de médecine avait recommandé 1500 mètres voici quelques années déjà.

L’Etat ne cesse de faire évoluer les règles pour satisfaire le lobby des spéculateurs du vent. Dernier cadeau annoncé : le secrétaire d’Etat auprès de Nicola Hulot veut rendre plus difficile les recours contentieux des associations (même logique que François Hollande qui, pour protéger la promotion immobilière, a, par les ordonnances de février 2014, rendu plus difficile le recours des citoyens). L’éolien ne fait pas bon ménage avec la démocratie. Les projets d’aérogénérateurs ne font jamais l’objet d’un référendum local et se développe le plus souvent dans la plus grande discrétion pour ne pas alerter les défenseurs du paysage et du cadre de vie. Ainsi, loin de défendre la population, l’Etat fait le jeu des spéculateurs internationaux du vent contre l’intérêt des Français.

 

L’énergie entre les mains du capitalisme international

L’installation d’un parc éolien se joue en deux temps. Dans un premier temps, un développeur d’éoliennes contacte les maires situés près d’une ligne électrique et lui vante les bénéfices financiers à attendre d’une implantation. En cas d’accord, il monte le dossier, fait faire les études (souvent affligeantes en ce qui concerne le paysage, l’impact sur la santé publique et sur la faune), contribue à l’enquête publique, défend le projet devant le tribunal administratif. Coût de l’opération : environ 1 million d’euros.

L’autorisation obtenue est mis en vente sur le marché mondial. Elle est acquise le plus souvent par des fonds de pension américains, britanniques, canadiens… par des pétroliers…, pour une somme de l’ordre de 15 millions d’euros pour un parc de 5 aérogénérateurs. L’acheteur dépensera encore quelques millions d’euros pour l’acquisition des machines et leur montage. Il vendra sa production à EDF qui est tenu de la racheter à un prix supérieur au prix de marché de l’électricité pendant une durée contractuelle de 10 ans. La différence est payée par la taxe dite contribution au service public de l’électricité (CSPE) que paient dorénavant tous les consommateurs d’énergie. Cette taxe vient encore d’augmenter.

Tous les acteurs gagnent, sauf le consommateur français. Le développement de l’éolien industriel est d’abord une affaire de gros sous : la principale motivation n’est pas de produire des kW.h mais des euros dans un cadre sans risque puisque garanti par l’Etat.

L’une des conséquences de ce développement est de placer l’appareil de production énergétique d’origine éolienne entre les mains de capitaux étrangers : les consommateurs français sont ainsi appelés à contribuer aux retraites des Américains et des Britanniques.

 

Pour une transition énergétique intelligente

Il ne s’agit pas de mener une guerre idéologique contre les aérogénérateurs industriels, mais d’exiger que l’Etat reprennent la main sur le développement de l’éolien en localisant les zones d’implantation et en précisant des modalités qui préservent les paysages, la population et la démocratie. Une transition énergétique intelligente suppose le courage de fixer comme objectif central la réduction de la consommation d’énergie, quelle qu’en soit la source, et de définir une stratégie au service de cet objectif : interdiction du chauffage électrique, limitation des éclairages nocturnes, réduction des déplacements imposés en voiture par une interdiction de construire des zones d’activités près des échangeurs routiers et de grandes surfaces commerciales en périphérie de ville, isolation des bâtiments, interdiction de construire des bâtiments énergivores….

A chaque région, un mix énergétique conforme à son tempérament. Les aérogénérateurs n’ont pas leur place dans les espaces naturels, les montagnes et les forêts, ni dans le champ de visibilité de nos monuments.

L’Etat protège-t-il les intérêts de grands groupes financiers ou la santé et le cadre de vie des Français ? Très clairement, les décisions prises au cours des dix dernières années profitent à la finance internationale au détriment des gens.

 

Signalons (septembre 2019) la parution du livre d'Antoine Waechter Le scandale éolien aux éditions Baudelaire.

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29 octobre 2017 7 29 /10 /octobre /2017 15:24

Sous la pression conjuguée du réchauffement climatique et de l’inéluctable déplétion pétrolière, la voiture à moteur thermique est aujourd’hui sur la sellette. Ici et là, on avance publiquement un terme à sa commercialisation et parfois même à son utilisation (1). De nombreux pays semblent désormais décidés à faciliter le basculement vers la propulsion électrique présentée comme une évidence. Taxation croissante des carburants, mise en place de réseaux de bornes de recharge, véhicules électriques en auto-partage,  évocation de mesures coercitives… Tout va en ce sens, au moins pour les déplacements urbains et périurbains.

En conséquence, après avoir végété plusieurs décennies et plus d’un siècle après son invention la voiture électrique prend enfin son envol. Elle n’est plus désormais réservée aux seules flottes à usage restreint et déjà deux millions d’entre-elles circuleraient dans le monde.

Rien n’est simple. A peine le ciel se dégage-t-il au-dessus de ce que certains qualifient peut-être un peu vite « d’auto propre » que fusent les critiques et les interrogations.

Interrogations des utilisateurs potentiels d’abord, qui voient bien que la technologie n’offre pas aujourd’hui une totale substituabilité. L’autonomie réelle des voitures électriques reste largement inférieure à celles des véhicules thermiques et des rumeurs d’écarts très importants entre les annonces flatteuses et la réalité n’arrangent rien. Mais surtout, les temps de recharges restent absolument prohibitifs. Alors qu’un plein pour 7 ou 800 km demande trois minutes avec une voiture à essence il faut plusieurs heures pour atteindre de quoi faire 150 ou 200 km en électrique. Cela exclut une bonne partie des usages malgré quelques possibilités de recharges partielles plus rapides (2).

Beaucoup d’écologistes aussi sont très  circonspects, accusant la voiture électrique de ramener la pollution du pot d'échappement vers la centrale électrique. L’ensemble du cycle automobile pose également problème. La voiture électrique n’est guère plus propre à produire et à recycler et la fabrication des batteries est loin d’être irréprochable. Les coûts écologiques de l’extraction de certains éléments rares doivent être pris en compte et la raréfaction prévisible de ces matériaux constitue un handicap supplémentaire.

Pour faire bonne mesure, ajoutons qu’évidemment la hausse attendue de la demande en électricité liée la généralisation de ce mode de propulsion fait surgir chez les écologistes le spectre honni d’une relance du programme nucléaire, même si certains tablent sur des énergies renouvelables toutes puissantes pour demain (3 et 4).

Hélas, la vraie barrière est plus profonde et bien rarement mise en avant.  Imaginons ainsi que, par quelque miracle, nous inventions une batterie capable de faire rouler une voiture un million de kilomètres, voler un avion ou chauffer une maison des années durant... Pour faire au mieux imaginons que cette batterie ait la taille d'un dé à coudre, que sa fabrication comme sa charge initiale ne coûtent ni ne polluent quasiment rien et même qu'elle soit 100 % recyclable. La science triomphante aurait-elle alors répondu à toutes les critiques et sauvé la planète ? 

Bien au contraire ! Ce fabuleux pouvoir de l'énergie sans contrainte serait celui qui nous conduirait à détruire la Terre, car il n'y aurait plus alors de limite à notre emprise. Nous nous permettrions tout, fabriquerions tout, croulerions sous les objets. Nous nous installerions partout et artificialiserions l'ensemble des espaces, couvrant la moitié du monde de béton et l'autre moitié de macadam, ne laissant rien au monde animal ou végétal et offrant à une seule espèce la mainmise sur l'ensemble de la planète, en flagrante contradiction avec toute l'histoire de la vie.

Il s'agit là de l'un des arguments les plus importants en défaveur d'une fuite en avant technologique. Ce ne sont pas les imperfections et les insuffisances de la technologie qui la condamnent, ce sont au contraire ses potentialités.

Il va de soi que cette critique ne s'adresse pas à la seule voiture électrique, ni même à la seule question de la production d'énergie, elle pose en fait le problème du pouvoir excessif. Même masquée par toutes les bonnes intentions du monde, l'amélioration de notre efficacité se traduit par l'augmentation de notre pouvoir sur la biosphère et ce pouvoir est en lui-même source incontournable de déséquilibre. Ainsi, tous nos efforts d'optimisation sont-ils peut-être vains par nature.

Curieusement, ce sont sans doute les défauts des énergies actuelles : coûts, difficultés d'accès, raréfaction et même pollution engendrée qui protègent la Terre en fixant une limite à nos capacités. L'autre limite pourrait être notre sagesse, c'est à dire l'engagement vers un partage du monde avec le reste du vivant.

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(1) Sans, disent-elles, vouloir stricto sensu l’interdiction, les autorités parisiennes ont annoncé viser la fin de la circulation des automobiles à essence dès 2030 (dans 13 ans !) et même dès 2024 pour les véhicules diesel. En Norvège 16 % des voitures neuves vendues en 2016 seraient à propulsion électrique. Oslo annonçait également dès 2015 l’interdiction des voitures en centre-ville pour 2019 !  La Chine elle-même avec son gigantesque marché souhaiterait s’orienter vers l’électrique.

(2) Les recharges  partielles  peuvent être plus rapides dans des bornes adaptées.

(3) Energies dont nous ne tarderons pas à trouver les inconvénients dès leur généralisation. La voiture solaire par exemple restera une chimère, la surface d’un véhicule ne permet de recevoir qu’une proportion infime de la puissance nécessaire au fonctionnement d’un véhicule, les rendements seraient-ils - et ils en sont loin - de 100 % de bout en bout. La question des matériaux et de l’énergie utilisés pour toutes ces réalisations se posera également, suscitant des doutes sur le rendement global de telle ou telle filière.

(4) Ne sont pas abordées ici les questions connexes que sont l’équilibre entre les transports privés et les transports publics, ni le problème plus fondamental de l’obligation de mobilité permanente qu’imposent nos sociétés. Ces interrogations s’appliquent évidemment à la propulsion thermique comme à la propulsion électrique. Sur un point plus restreint, ne sont pas abordées non plus d'autres manifestions de pollution liées à l'usage comme l'émission de particules lors du freinage ou le dépôt de gomme sur les chaussées, là aussi, voitures électriques et thermiques sont concernées de façon comparable. Un autre volet pourrait aussi être évoqué, celui des voitures "intermédiaires", c'est à dire les véhicules hybrides rechargeables chez soi et permettant une autonomie électrique pour les petits déplacements (domicile-travail par exemple) tout en permettant les longs trajets grâce au moteur thermique.

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29 mai 2017 1 29 /05 /mai /2017 18:24

Nombreux sont ceux qui imaginent bien des difficultés au sujet du pilotage de la transition énergétique que devraient conduire ensemble Nicolas Hulot et Edouard Philippe, ancien salarié d'Areva et nouveau premier ministre. Pour ceux-là, un pro-nucléaire et un écolo ne pourraient pas s'entendre, et il est vrai que les relations exécrables qu'ont entretenues le lobby EDF et un courant écologiste qui s'est largement construit autour de la question nucléaire laissent a priori peu de place à une démarche constructive.

Ce raisonnement a pour lui l'évidence des apparences mais il fait fi d'une situation qui n'a jamais autant été ouverte à une évolution négociée de part et d'autre.

Quel est l'objectif ? Réduire la part du nucléaire de 75 à 50 % en 7 ou 8 ans.

Pour les écologistes réalistes, une réduction plus forte, même si elle était souhaitable, n'est matériellement pas possible dans ce laps de temps. Et il sera toujours temps dans quelques années de rediscuter les objectifs pour l'après 2025.

Du côté des tenants du nucléaire, ils ne peuvent pas nier les difficultés rencontrées dans la mise au point des EPR, ni ne pas voir l'envolée des coûts de production du kWh avec des centrales nucléaires rendues plus fiables et plus sûres mais plus chères à construire et à faire fonctionner. Ce point est d'autant plus sensible que dans le même temps, d'une part les coûts des ENR ont baissé sensiblement, et que d'autre part le grand public est désormais averti que les coûts de déconstruction des centrales nucléaires ont été longtemps minorés par les acteurs de la filière.

Et puis il y a aussi tous ces pays qui décident de sortir du nucléaire comme l'Allemagne ou la Suisse, et qui font un peu douter de la pertinence d'un modèle privilégiant massivement l'énergie nucléaire.

Dans ce cadre, ne dépendre du nucléaire à moyen terme que pour un kWh sur deux devient une solution raisonnable pour toutes les parties, même si la liquidation d'une partie de cet outil industriel est socialement problématique comme l'ont montrée les réactions autour de la fermeture de Fessenheim.

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24 janvier 2017 2 24 /01 /janvier /2017 15:04

 

Par Daniel Martin

 

Ramener la part du nucléaire de 75 à 50 % dans la production d'électricité en France d'ici 2025, comme l'avait promis François Hollande, ainsi que la réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 avec l'atteinte de de 32 % d'énergies renouvelable dans la consommation énergétique finale à cette même date et la division par deux de celle-ci à l'horizon 2050. Mais au delà des intentions, quelle réalité ?

Il est évident que passé les effets d’annonce cela n’impliquera pas automatiquement des fermetures de centrales nucléaires, notamment pour ne pas braquer EDF. Selon les auteurs de la loi 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, la consommation ayant, selon EDF, tendance à se stabiliser, mais que ne confirme pas les statistiques, un développement important des autres sources d’énergie, surtout renouvelables, ferait mécaniquement baisser la part du nucléaire…Mais qu’en est-il réellement ?

Qu’en est-il de la production et de la consommation actuelle d’électricité en France ? (extrait des bilans publiés par RTE).

Production en hausse

D’après RTE, la production d’électricité en France métropolitaine a atteint 546 TWh en 2015, soit 1,1 % de plus qu’en 2014 (pour les unités utilisées ici voir, note a).

Plus des trois quarts de cette production proviennent toujours du parc nucléaire de 58 réacteurs (416,8 TWh, 76,3 % du mix). L'hydroélectricité (via les barrages) reste la deuxième source d’électricité (58,7 TWh, 10,8 % du mix) malgré une forte baisse de sa production par rapport à 2014 (- 13,7 %) en raison d’un niveau de pluviométrie bien plus faible.

La part des énergies dites « renouvelables » dans la production nette d'électricité atteint 16,2 % en 2015 (hydroélectricité : 9,9 %, éolien : 3,9 %, solaire : 1,4 %, bioénergies : 0,9 %).

La production photovoltaïque a connu en 2015 une croissance légèrement supérieure à celle de l’éolien (+ 25,1 %) mais sa part dans le mix électrique français reste limitée avec 1,4 % de la production totale. Signalons la mise en service en septembre dernier du plus puissant parc photovoltaïque d’Europe (300 MWc) à Cestas en Gironde.

C’est la production électrique des centrales à gaz qui a connu la plus forte croissance en 2015 (+ 54,8 %). Elle s’est élevée à 22,1 TWh, soit à près de 4 % du mix national et à un niveau légèrement plus élevé que la production éolienne. Les centrales à gaz ont en effet a davantage sollicitées comme moyens d’appoint lors des périodes de forte demande. Malgré la fermeture des 6 dernières centrales à charbon de plus de 250 MW en France, la production des centrales à charbon et à fioul a quant à elle légèrement augmenté comptant au total pour 2,2 % de la production électrique nationale. Une aberration, quand on se fixe pour objectif une réduction des rejets des gaz à effet de serre (GES)… 

Lorsque RTE affirme que les émissions de CO2 du secteur de la production électrique française restent stables, il y a toutefois de quoi s’interroger quand on sait que pour 1 kWh, la combustion du fioul rejette 300 g de CO2, celle du gaz naturel 234 g et celle du charbon 384 g.

Consommation en hausse

D'après EDF, en 40 ans la consommation d'électricité a augmenté de 280 % . La consommation mondiale d'électricité en 2013 est de 21 538 TWh. Elle a augmenté de façon continue de 350 % (voir ici les statistiques EDF).

Une hausse de la consommation d’électricité de 2,2 % en 2015.

La consommation d’électricité en France métropolitaine s’est élevée à 475,4 TWh en 2015, soit 2,2 % de plus qu’en 2014, (le double de l’augmentation de la production : 1,1 %). Cette hausse est principalement liée aux températures en moyenne plus fraîches en début d’année (entraînant un recours accru au chauffage) et plus chaudes en été (augmentant les besoins de froid). En « corrigeant » cette consommation de l’aléa climatique, RTE indique que la consommation française a seulement augmenté de 0,5 % en 2015 (475,4 TWh, niveau similaire à celui de 2013)… Selon EDF, la croissance de la demande d’électricité s’est fortement ralentie depuis plusieurs décennies, notamment en raison de la tertiarisation de l’activité économique, sans oublier les nombreuses fermetures d’entreprises et de l’impact des actions de maîtrise de la demande d’énergie. Elle reste toutefois très « thermosensible » : chaque degré Celsius en moins en hiver entraîne, selon RTE, un appel de puissance supplémentaire sur le réseau de 2 400 MW (soit l’équivalent de la capacité installée de 2 réacteurs nucléaires. Cette sensibilité est pourtant amenée à se réduire suite à l’entrée en vigueur de la RT 2012 , une réglementation thermique qui a déjà entraîné une chute du chauffage électrique dans les logements neufs. Précisons que le secteur résidentiel compte en 2015 pour environ 35 % de la consommation électrique en France métropolitaine.

Selon la formule de certains candidat(e)s aux Présidentielles « Cent pour cent d’énergie dite renouvelable » à l’horizon 2050 est-ce possible ?

Lors des primaires d’EELV « cent pour cent d’énergie renouvelable en 2030 » était une formule souvent reprise par Mme. DUFLOT et depuis par M. JADOT leur candidat à l’élection présidentielle de 2017. A l’évidence ils ne font que reprendre les propositions dun rapport prospectif baptisé RE-thinking 2050 publié par le Conseil Européen, afin d’obtenir une énergie 100 % renouvelable en 2050. Ses propositions nécessitent toutefois que la demande en énergie soit fortement revue à la baisse. Le rapport détaille ainsi les mesures qu’il serait nécessaire d’adopter pour atteindre cet objectif, ainsi que les bénéfices économiques, environnementaux et sociaux espérés d’une telle mesure. Même en envisageant une très forte baisse de la consommation d’électricité, encore faut-il que cela soit possible, compte tenu de la croissance démographique, des besoins légitimes des pays pauvres et ceux de la quatrième révolution industrielle, dans laquelle nous entrons à marche forcée avec l’explosion des nouvelles technologies du numérique …

Eolien et Photovoltaïque peuvent-ils constituer une alternative au nucléaire dans la perspective «cent pour cent d’énergie renouvelable» ?

Un réacteur nucléaire possède en moyenne une puissance électrique d’environ 1 100 MW et peut donc délivrer entre 7 et 8 000 000 MWh par an. Les éoliennes les plus puissantes d’aujourd’hui sont capables de développer une puissance de 5 MWh, dont les meilleures (off-shore) délivrent en moyenne 17 000 MWh par an. Le chiffre retenu pour l’éolien européen installé est de 2 000 MWh de production annuelle par MW de puissance installé par éolienne.

Combien d’éoliennes pour remplacer un réacteur ?

Moyenne annuelle de la production d’électricité par un réacteur nucléaire: (7 000 0000 + 8 000 000 MWh) / 2 = 7 500 000 MWh / an

Moyenne annuelle de la production d’électricité avec l’énergie éolienne de très grande capacité (5 MWh) : 2 000 MWh X 5 MWh = 10 000 MWh an et par éolienne

7 500 000 MWh / 10 000 MWh = 750 éoliennes pour remplacer un réacteur nucléaire (source : site Ethicologique)

Sachant qu’il y a 58 réacteurs nucléaires (le 59ème à Marcoule étant réservé à la recherche) il faudrait : 750 x 58 = 43 500 éoliennes d’une puissance unitaire de 5 MWh. Sachant que la puissance moyenne des futures éoliennes construite en France étant de 3 MW, avec une moyenne annuelle de production de 2000 MWh, il faudrait : 2 000 x 3 = 6 000 MWh soit : 7 500 000 MWh / 6 000 = 1250 éoliennes pour remplacer un seul réacteur Nucléaire x 58 = 72 500 éoliennes pour remplacer le parc Nucléaire Français.

Si on considère que la production d’une éolienne moyenne se situe plutôt actuellement aux environ de 1,8 à 2 MWh on peut estimer à plus de 100 000 le nombre d’éoliennes qui seraient nécessaires au remplacement du parc nucléaire et ceci en supposant que l'on sache stocker l'énergie pour les heures de pointes... Ce qui est, actuellement, loin d'être le cas.

Le photovoltaïque, qu’en est-il ?

En 2015, l’Europe totalise une puissance cumulée de 94,6 GW soit deux fois le résultat obtenu par la Chine. Notons que, même si l’Allemagne réalise une bonne partie du boulot, l’Italie prend la deuxième place avec une puissance cumulée de 18,9 GW. Le troisième n’est autre que le Royaume-Uni avec 8,9 GW. La France se positionne juste en-dessous avec 6,6 GW soit deux places devant la Belgique (3,2 GW), voir ce lien pour plus de détails. Comparé à 10,32 GWh par jour en 2012, c’est une croissance annuelle de 17,8 %.

Par rapport à ses voisins, la France est un nain photovoltaïque : un parc installé d'un peu moins de 4,5 GW contre 37,5 GW pour l'Allemagne pourtant moins ensoleillée. 4,5 GW c'est à peu près ce que l'Allemagne a installé pendant la seule année 2013 alors que les installations se sont sérieusement ralenties outre-Rhin (plus de 7 GW en 2011, idem en 2012). En puissance installée par habitant, la France dispose de 64 watts de solaire photovoltaïque, contre 400 pour l'Allemagne, 280 pour l'Italie, 250 pour la Belgique, et 110 pour l'Espagne où tout est fait pour décourager l'investissement dans le secteur malgré un ensoleillement très favorable.

A titre d’exemple : A Dunkerque, 1 kWc de photovoltaïque plein sud produit 1 000 kWh, à Toulon 1 430 kWh, soit 1 215 kWh en moyenne pour la France. Il faut 6,64 m² de panneaux photovoltaïques pour 1 kWc. Donc 3 000 km², cela nous donne 450 millions de KWc et 548 TWh produits. Soit à peu près que ce que produit réellement le parc nucléaire français. En fait, 3 000 km², ça fait un carré de 55 km de côté, où la superficie d’un département comme le Rhône. Est-ce vraiment si énorme ? En France, la surface bâtie représente plus de 20 000 km². Il suffirait donc d’équiper 15% des toitures pour produire autant d’énergie que l’ensemble des réacteurs nucléaires français... N'a-t-on pas au moins 15 % des toitures qui sont bien orientées ? Mais au-delà des capacités de production, éolien-photovoltaïque qui peuvent théoriquement compenser en équivalence la production nucléaire actuelle se pose le problème et pas des moindres, celui du stockage. Malgré les efforts de la recherche et les résultats obtenus par exemple concernant les supers condensateurs, il ne peut y avoir de transition énergétique qui réponde aux impératifs de baisse du Nucléaire et des réductions des gaz à effet de serre (GES) sans décroissance drastique de la consommation d’énergie...

L’éolien et le solaire sont, par ailleurs très dépendants de métaux rares dont l’accès pourrait devenir de plus en plus incertain, a fortiori si ces formes d’énergie doivent être massivement développées. Exemple : le dysprosium et le néodyme, deux terres rares produites presque exclusivement par la Chine, laquelle a d’ores et déjà fait savoir que ses gisements actuels étaient en déclin. Il faut savoir qu’une voiture hybride contient un kilogramme de néodyme et Selon les études réalisées à ce jour, une éolienne utiliserait de 600 à 700 kg d’aimants par MW de capacité, dont 25 à 29 % de néodyme et 4 % de dysprosium dans l’aimant permanent de la génératrice (voir ce lien pour plus d’informations). Il faudrait multiplier par 26 d’ici à 2035 les extractions de dysprosium pour faire face aux enjeux du changement climatique…

Je rappelle que les terres rares désignent 17 métaux : le scandium, l'yttrium, et les quinze lanthanides. (Lanthane, Cérium, Praséodyme, Néodyme, Prométhium, Samarium, Europium, Gadolinium, Terbium, Dysprosium, Holmium, Erbium, Thulium, Ytterbium, et Lutécium) Ces matières minérales aux propriétés exceptionnelles sont utilisées dans la fabrication de produits de haute technologie. Avec le boom du numérique et des nouvelles technologies "vertes", aujourd'hui, à l'échelle de l'économie mondiale, les terres rares sont considérées comme des métaux stratégiques. On retrouve ainsi des terres rares, non seulement dans l’éolien ou le photovoltaïque, mais aussi dans les batteries de voitures électriques et hybrides, dans les LED, les puces de Smartphone, les écrans d'ordinateurs portables…L'industrie de la défense a elle aussi recourt aux terres rares dans la fabrication de capteurs de radars et sonars ou de systèmes d'armes et de ciblage.

Selon les experts, pour sortir du nucléaire et du fossile, il faut accepter une décroissance minimum de 2 % à 3 % par an du PIB, pendant 20 ans. L'autre alternative serait de continuer avec les énergies fossiles, comme outre-Rhin. Ce qui est inacceptable et à terme impossible, comme le recours croissant et démesuré aux terres rares, dont les réserves ne sont pas inépuisables.

Démographie - besoins - consommation, l’impossible équation

On ne peut faire également l’impasse sur la question de la bombe Démographique, dont les effets des explosions successives sur la planète, notamment par la dernière croissance décennale de près d’un milliard d’habitants, ont un impact particulièrement néfaste pour le climat. Phénomène auquel la France n’échappe pas et qui impose d’urgence une décroissance du PIB. Un effort titanesque doit être fait pour économiser l'énergie et les ressources conduisant à la baisse du PIB, indicateur qui doit être dénoncé et repensé.

Quelques exemples de l’impact démographique sur la croissance de la consommation d’électricité pour des pays à population à peu près comparable : La France, 65,6 millions d’habitants, dont la consommation par habitant est passée de 2 746 kWh en 1971 (50 millions d’habitants) à 7 374 kWh en 2013, ou la Thaïlande, (66 millions d’habitants aujourd’hui contre 38 en 1971) qui passe dans la même période de 120 kWh par habitant à 2 471 kWh. Et que dire de la République Démocratique du Congo, 74 millions habitants, (20 millions d’habitants en 1971) avec 56 kWh par habitant en 1971 et 234 kWh en 2013. Les exemples de ce type sont légion (voir ici les données de la banque mondiale)

Certes, il existe de grandes disparités dans l’accès à l’électricité selon les régions du monde. Si certains pays souffrent encore de graves pénuries électriques, la consommation électrique globale connaît pourtant une croissance constante depuis 1971 qui a été multipliée par 3,2 alors que la population mondiale a été multipliée par un peu moins de 2, ce qui est considérable et ne semble pas prêt de s’arrêter. Pas un pays n’a connu une stagnation de la consommation entre 1971 et 2013. Tous, sans exception, ont eu une consommation annuelle en progression constante par habitant, qui va s’amplifier à cause des besoins légitimes des populations du tiers monde, de la croissance démographique et les exigences des nouvelles applications de l’intelligence artificielle inhérent à la quatrième révolution industrielle. Il faut savoir qu’entre 2001 et 2010, la consommation de certains pays en développement a considérablement augmenté : elle a été multipliée par 2,8 pour la Chine, par 1,8 pour l’Inde et par 1,5 pour le Brésil. En France, la consommation totale d’électricité a presque été multipliée par 1,5 en 20 ans.

Pour conclure

La démonstration est faite qu’au rythme actuel de notre consommation d’électricité qui suit l’accroissement de la population, la sortie du Nucléaire ne peut se faire en équivalence de production et consommation par l’éolien et photovoltaïque, essentiellement à cause des problèmes actuellement non résolus du stockage. La seule façon d’y parvenir consiste à ce que la fermeture d’un réacteur nucléaire soit compensée par une énergie dite renouvelable (éolien, photovoltaïque, etc.) et dans une proportion plus importante par des économies d’énergie évaluées et chiffrées, au premier rang desquels le domestique par un changement radical de nos habitudes de consommation et du gaspillage qui en découle dans les pays riches, ainsi que l’abandon du chauffage électrique, mais également sur le plan professionnel. Il faut aussi éliminer tous les gaspillages de type urbain la nuit par un éclairage totalement repensé. Mais aussi sortir de la stupide politique de promotion de la voiture électrique. C’est une escroquerie intellectuelle, quand on connait le coût énergétique et polluant, sans compter le même espace qu’elle occupe qu’une voiture thermique... Aujourd’hui on sait produire des véhicules thermiques qui consomment deux litres de carburant au 100 kilomètres. Le leurre de la voiture électrique justifie des voitures de plus en plus énormes (4X4) à 10 ou 15 litres de consommation d’essence ou pire encore de gasoil aux cent kilomètres...
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(a) Rappel sur les unités utilisées dans cet article

La puissance (produite ou consommée) s’exprime en watts (W), un watt correspond à la puissance d’un système énergétique dans lequel est transférée uniformément une énergie de un joule pendant une seconde

L’énergie s’exprime en joules (J), elle correspond à l’application d’une puissance pendant un temps donné. Ainsi une puissance de un watt appliquée pendant une seconde donne un joule, appliquée pendant une heure (3 600 secondes donc) elle donne un watt-heure (Wh) qui est bien une unité d’énergie ainsi que ses multiples :

Le kilowatt-heure (kWh) :      103  Wh soit 1 000 watts-heures  (3,6 x106 joules)
Le mégawatt-heure (MWh) : 106  Wh soit un million de watts-heures
Le gigawatt-heure (GWh) :   109  Wh soit un milliard de watts-heures
Le térawatt-heure (TWh) :    1012 Wh soit un billion de watts-heures

Les réacteurs nucléaires ont typiquement une puissance (électrique) d’un peu plus de 1 GW, les grandes éoliennes atteignent parfois 5 ou 6 MW. Toutefois, pour les sources d’énergies intermittentes comme le solaire et surtout l’éolien, il est particulièrement important de distinguer la « puissance crête » (notée Wc) qui ne s’obtient qu’une très faible partie du temps quand les conditions (ensoleillement et vent) sont optimales de la production moyenne sur une heure ou effective sur une année. L’article rappelle ainsi qu’un mégawatt de puissance installée dans l’éolien ne fournit environ que 2 000 MWh sur un an (alors qu’une année comprend 8 766 heures).

Cet article a préalablement été publié sur Agoravox et l'Express.

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15 mars 2015 7 15 /03 /mars /2015 21:24

L'écologie politique a beaucoup de défauts mais on s'accorde souvent à reconnaître le mérite aux écologistes d'avoir eu raison trop tôt, que ce soit quant aux dangers de l'industrie nucléaire ou à propos des risques pour notre santé d'un environnement dégradé. Il y a pourtant un sujet où les prédictions écolos semblent avoir tout faux : le coût de l'énergie et notamment du pétrole.

Depuis des années en effet les écologistes nous annoncent un coût de plus en plus élevé du pétrole en se basant sur son utilisation croissante et sa raréfaction programmée dans un monde forcément fini. Ce qui est rare devient cher … le dicton bien connu des économistes a vite été adopté par des écologistes pourtant souvent opposés à la logique de l'économie de marché. Il est vrai que cette annonce était « pain béni » pour tous ceux qui préconisaient une sobriété énergétique autant basée sur l’efficience que sur la définition d'un nouveau mode de développement toujours revendiqué mais rarement détaillé.

Nul besoin d'imaginer un pouvoir politique fortement contraignant pour motiver les citoyens-consommateurs comme les producteurs de s'adapter à cette nouvelle donne, le signal-prix allait se charger de faire rentrer les plus récalcitrants dans le rang du développement durable. Avec un baril de pétrole à 200 dollars avant la fin de la décennie, et qui allait encore monter par la suite, il était assez facile d'expliquer aux bons citoyens que leur intérêt consistait à diviser par trois dans leur habitat leur consommation de fuel ou de gaz ou d'électricité (a priori indexé sur le prix du baril) en engageant au plus vite des travaux même lourds d'amélioration. Idem pour les industriels ou les agriculteurs. En fait, la future hausse du pétrole finançait les travaux à prévoir pour améliorer les process industriels et l'habitat : il suffisait de gager les travaux à faire sur les économies que ceux-ci allaient générer en nous permettant d'échapper au coût croissant de l'énergie. Ainsi allions-nous sans beaucoup d'effort, et grâce à des tiers-financeurs, aller vers une sobriété heureuse en échappant par là-même, au moins partiellement, à l'augmentation tant honnie des gaz à effet de serre. Patatras, en six mois le prix du baril d'or noir a été divisé par plus de deux et les meilleurs spécialistes nous annoncent que le prix baril risque de se situer pour plusieurs années autour de 50 dollars le baril, rendant économiquement injustifiées les investissements massifs nécessaires dans les énergies renouvelables comme dans la sobriété énergétique de nos habitats.

Comment en est-on arrivé là ? C'est juste que les écologistes ont oublié deux choses.

D'une part, que le pétrole et son prix sont d'abord les produits d'une géopolitique qui ne laisse que peu de place à la pure logique du marché (ce que les années Reagan nous avaient déjà montré, avec des cours manipulés pour atteindre de plein fouet les revenus de l'URSS).

D'autre part, que les moyens mis en œuvre pour exploiter massivement des produits pétroliers dits non-conventionnels (gaz de schiste, etc.) ainsi que les progrès techniques effectués pour forer toujours plus loin allaient permettre de mettre sur la place toujours plus de barils à coût raisonnable, au moins pour quelque temps. Bien évidemment, rien ne dit que dans quinze ou vingt ans l'économie pétrolière ne ressemblera pas à celle prédite par les écologistes, avec une énergie rare et chère … mais c'est maintenant qu'il faut que nous nous orientions vers une sobriété sans mesure connue dans le monde économiquement développé, si nous voulons éviter les catastrophes écologiques majeures qui déjà se dessinent.

En 2030, avec des courbes qui se prolongent, plusieurs seuils d'irréversibilité seront franchis pour le pire sur la planète. Puisque nous ne pouvons plus compter sur le signal-prix du pétrole pour arguer du changement nécessaire, il revient donc à notre communauté de faire le choix politique d'imposer des mesures draconiennes. La baisse du prix du pétrole ne nous laisse pas le choix, c'est vers un monde autoritairement régulé que l'écologie politique doit nous amener.

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14 novembre 2014 5 14 /11 /novembre /2014 15:50

Le pays est en risque terroriste et des drones survolent nos centrales nucléaires sans qu'on puisse identifier ni les raisons d'un tel acte ni ses auteurs, même si certains incriminent volontiers des écologistes radicaux.

Arrêtons-nous un instant sur la situation, bien loin de celle qui prévalait dans les années 70 au moment où la France a fait le pari du nucléaire civil. A l'époque le risque principal identifié était situé à l'Est, en Union Soviétique, dans une logique d'affrontement militaire qu'on aurait tendance aujourd'hui à qualifier de classique ; avec par ailleurs, ne l'oublions pas, déjà des terroristes, mais ceux-ci se contentaient la plupart du temps de détourner momentanément un avion de ligne en sifflotant l'Internationale. Même s'il ne faut pas oublier les victimes de ces attentats, ce monde était assez simple et la sécurité, y compris celle du nucléaire civil, pas trop compliquée à assurer.

Entre-temps la France est devenu un des pays les plus nucléarisé du monde et ressemble désormais à un nid de centrales. Et le monde a changé. Les dictatures communistes qui nous menaçaient se sont effondrées, la guerre froide a pris fin, et les menaces ont changé de nature : le risque ne vient plus d'autres états mais d'organisations non-gouvernementales terroristes capables d'organiser des actions commandos en dehors de tout respect du droit de la guerre. Et depuis le 11 septembre nous savons qu'il n'y a plus de zone protégée, le risque pays est potentiellement partout.

Dans ce cadre nos centrales sont des cibles.

Elles représentent une telle concentration d'énergie que tout incident les affectant peut avoir des conséquences lourdes. Bien sûr les réacteurs sont protégés, mais une centrale, c'est tout un ensemble de fonctions autour de la pièce principale qu'est le réacteur, du système de refroidissement (dont l'accident de Fukushima a montré l'importance) au système de distribution de l'électricité produite. Dans cet ensemble, et sans même être obnubilé par la théorie du cygne noir développée par Nicholas Taleb, il y a toujours un maillon faible plus accessible à une action terroriste de petite ampleur et de grandes conséquences. C'est pourquoi notre choix d'avoir recours à un système de production d'énergie extrêmement concentré et ce à partir d'un carburant dangereux, constitue aujourd'hui dans le monde tel qu'il est un problème pour la sécurité du pays.

Au-delà du risque technologique, au-delà du risque sismique d'ailleurs déjà réévalué, le nucléaire civil par son essence même accentue le risque terroriste dans un monde de plus en plus ouvert aux conflits de toute nature.

A cette heure nous ne connaissons pas le danger que représentent ces drôles de survol. Simple facétie militante réactivant la logique de guignol face à notre État-gendarme, ou prélude à des actions dangereuses ? Puissent au moins ces drones non identifiés volant au-dessus de nos centrales permettre d'ouvrir le débat quant à l'impact du nucléaire civil sur notre sécurité collective.

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18 août 2014 1 18 /08 /août /2014 16:44

Depuis 1973 et la première crise du pétrole (1), l’énergie ne coule plus de source. Nous savons qu’elle a un prix, que ce prix peut augmenter et qu’un jour même, nous en manquerons (2). De cette prise de conscience naquirent et naissent encore toute une série d’exhortations à l’économiser. De la campagne de chasse au Gaspi qui fit entrer nos sociétés dans l’ère de l’infantilisation (3), jusqu’au récent programme de transition énergétique proposé en France par Ségolène Royal, les pouvoirs publics n’ont cessé de nous pousser à réduire nos dépenses en énergie tout  en nous incitant à consommer toujours plus. Cette prétention à concilier l’inconciliable : la croissance et la préservation des ressources, trouvera son oxymore parangon dans le concept de développement durable, médaille d’or des quêtes impossibles.  

Les incitations ont été multipliées, les aménagements fiscaux ont été nombreux, compliqués et contradictoires ; les primes elles-mêmes furent contre productives. La plus choquante fut sans doute  la prime à la casse qui conduisit, contre toutes  les règles de bon sens écologique, à réduire la durée de vie des automobiles, dont la construction nécessite pourtant beaucoup de matières premières et d’énergie. Bref une fois encore, le médiatique prit le pas sur l'intelligence et l'efficacité.  

Et si nous faisions fausse route ?  

Si au lieu de ces règles compliquées et par là coûteuses et parfois difficilement applicables, nous nous fixions comme axe, sinon unique, du moins largement prioritaire, une seule ligne de conduite: Augmenter le prix de l’énergie jusqu’à ce que l’économiser devienne effectivement rentable pour le particulier, pour l’entreprise et pour le pays dans son ensemble ? Souvent, aujourd’hui encore, les travaux d’économie ne sont jamais amortis, n’en déplaise à la propagande.  

Une telle orientation soulève quelques réticences : Mais comment vont faire  les gens si l’on augmente encore le prix de l’essence, du fioul, du gaz, de l’électricité ?  

Remarquons d’abord que cette question se posera de toute façon : Comment ferons-nous quand il n’y aura plus de pétrole ? Or, au cours de ce siècle, sans doute avant 2050, le pétrole manquera tout à fait ou du moins, ne sera plus disponible qu’en si faibles quantités qu’il deviendra négligeable dans le bilan économique global (peut-être pas sur le plan géopolitique). Quelques décennies plus tard, c’est le gaz qui, à son tour, fera défaut et seul le charbon offrira encore un peu de (polluante) résistance. Donc, augmenter le prix de l’énergie n’est pas créer pour les gens une nouvelle et insurmontable difficulté, il s’agit seulement de donner un peu plus tôt et partiellement - car l’augmentation du prix ne signifiera pas l’interdiction absolue d'en consommer - une image atténuée de ce qui, inéluctablement, surviendra un peu plus tard.  

D’autre part, on doit évidemment faire remarquer que les incitations fiscales ou les aides directes ne consistent qu’à donner d’une main ce que l’on reprend de l’autre, il faut bien financer ces mesures. « Comment feront les gens ? » dit-on, mais que je sache, il est encore plus impossible d’’échapper à l’impôt qu’à l’augmentation de l’essence, du fioul ou de l’électricité (l’on peut souvent rouler un peu moins, se chauffer un degré plus bas ou… mettre un pull).  

 Cette orientation unique : augmenter le prix de l’énergie, présenterait de nombreux avantages.

- Elle donnerait un cap et ferait comprendre la réalité du monde de demain : un monde de pénurie énergétique obligée. Tous n’en sont pas encore intimement persuadés. En ce sens, elle préparerait l’avenir et favoriserait un autre état d’esprit et donc une meilleure résilience face aux difficultés prévisibles de ce 21ème siècle.

- Plus simple, elle entrainerait de substantielles économies administratives et les inévitables injustices liées aux situations toujours particulières.

- Elle donnerait aux gens la possibilité de faire des arbitrages entre par exemple : le chauffage et le transport, le confort et la mobilité, un nouvel achat et des travaux d’isolation... Bref, elle rendrait à chaque foyer la main sur son mode de vie et développerait la responsabilité. 

- Elle règlerait assez facilement la question des résidences rarement occupées qui ne se trouveraient pas ainsi pris dans un carcan administratif tout à fait inutile.

- Elle inciterait évidemment lourdement à l’économie d'énergie et développerait les travaux d’isolation qui sont presque toujours d’origine locale, développant ainsi l’emploi partout en France.

Bien sûr, il est difficile de promouvoir un tel message, d’autant que le prix de l’essence, par exemple, est à la fois symbolique et souvent mal perçu (voir cet article). Pourtant cela me semble la seule direction raisonnable et pérenne. Peu à peu, quelques voix s’élèvent pour le réclamer. « Si l’on n’augmente pas le prix de l’énergie, on se dirige droit vers une dictature. » disait Marcel Boiteux ancien président d’EDF et en effet, les troubles qui pourraient naitre d’une mauvaise anticipation de la déplétion énergétique sont imprévisibles, nul ne peut exclure que des régimes autoritaires ne naissent des dégâts d’une telle impréparation.

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(1) En réalité la crise de 1973 ne fut pas réellement une crise de manque. Des raisons politiques et des ambitions de rééquilibrages économiques ont été déterminantes, néanmoins c’est en gros depuis cette période que le monde  occidental vit dans une crise larvée en ne réussissant pas à se débarrasser ni du chômage, ni des déséquilibres structurels des comptes publique et de l’endettement concomitant. Seule l’inflation semble pour l’instant avoir été contenue.  

(2) Une visite sur le site Manicore permet de faire un point sur la question.  

(3) Cette chasse au Gaspi fut en effet un modèle d’infantilisation Pourquoi Diable,  fallait-il inventer ce genre de choses - un personnage avec un entonnoir sur la tête - pour parler d’un problème sérieux ? Excellente illustration du recul de l’argumentation écrite et raisonnée au profit d’un audiovisuel simple à base de pictogrammes que l’on croirait destinés aux enfants de 5 ans. 

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  • : Site consacré à l'écologie et à la construction d'une société durable, respectueuse de l'environnement Auteurs : Didier Barthès et Jean-Christophe Vignal. Contact : economiedurable@laposte.net
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