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9 septembre 2014 2 09 /09 /septembre /2014 18:24

Comme d’autres, l’engagement en faveur de l’écologie donne lieu à de nombreuses dérives. Plusieurs d’entre elles tendent hélas, mais parfois à juste raison, à le déconsidérer aux yeux des personnes les plus sincères et les plus impliquées.

La plus évidente de ces raisons est la politisation dont le principal parti écologiste français nous montre trop souvent l’exemple (*). Le rattachement inconditionnel, et présenté comme naturel, à l’un des deux blocs de l’axe droite-gauche, s’accompagne à la fois d’une disparition des thèmes écologiques au profit des questions générales de sociétés et d’une coupure avec l’autre bloc où pourtant, la sensibilité aux questions environnementales a évidemment sa place. A ceci s’ajoute évidemment les ambitions personnelles qui brouillent le message et donnent une image peu reluisante de la mentalité écologiste. Oui, les écolos sont des hommes et des femmes comme les autres et la justesse de leurs engagements n’est gage ni de moralité ni  de désintéressement.

La seconde de ces dérives est le refus d’aborder certaines questions considérées comme taboues, la problématique démographique étant la première d’entre elle. Ce blocage mental, ou cette soumission à ce que l’on croit être le point de vue majoritaire des électeurs ne touche pas que les partis constitués, des personnes bénéficiant d’une aussi bonne image dans les milieux écologistes que Pierre Rabhi semblent avoir une aversion absolue pour l’évocation de ce sujet, comme si la Terre était infinie et comme si l’adoption d’un mode de vie particulier pouvait conduire à l’économie des questions quantitatives.

La troisième dérive est la désignation d’un certain nombre de boucs émissaires présentés comme responsables tous nos maux. Tout utilisateur écologiste (et dont les « amis » le sont aussi) du célèbre réseau Facebook peut en être le témoin permanent en recevant quotidiennement sur son « fil d’actualité » une impressionnantes quantité de dénonciations répétées et centrées autour de trois ou quatre « acteurs » diabolisés de nos sociétés. Parmi les acteurs économiques généraux : les banques, les compagnies pétrolières et les laboratoires pharmaceutiques. Parmi les acteurs économiques particuliers, la société Monsanto (semences, OGM) et la société Ferrero (fabricante du célèbre Nutella).

Ces critiques, sans être toujours infondées, loin de là, me semblent poser quatre problèmes.

- Elles touchent aussi les gens qui travaillent dans ces secteurs alors qu’il est bien improbable que ces personnes soient dotées d’une mentalité différente de la moyenne, ni les employés, ni les cadres ni même sans doute les actionnaires.

- Elles tendent à nier le tissu économique global et l’interdépendance de toutes nos activités,  ainsi par exemple les camions pollueurs et bruyants ne font que transporter les produits que par ailleurs nous désirons. Elles nient aussi certaines réalités comme par exemple la nécessité pour les acteurs des secteurs de l’énergie de manier de gigantesques sommes d’argent pour faire face aux contraintes de ces activités : On n’entreprendra jamais un forage à moins trois mille mètres sous les flots avec les économies d’un livret de Caisse d’Epargne.

- Elles laissent de côté la responsabilité du consommateur qui est pourtant bien le demandeur et  le consommateur final de tous ces produits et services mis au ban de la société. A nous exonérer ainsi de toute faute nous participons à l’infantilisation que par ailleurs nous dénonçons. Non, de gentils humains ne sont pas tous victimes d’une toute petite partie d’entre eux avides de profits au détriment de tous les autres. On ne peut à la fois défendre les humains et les considérer comme des marionnettes du consumérisme.

- Elles choisissent arbitrairement les bons et les méchants laissant curieusement inattaqués d’autres pans de nos activités tout aussi dommageables pour notre santé et pour l’environnement. L’exemple type est le tabac. Pour 100 dénonciations des OGM (dénonciation que j’approuve cependant) je n’ai décompté parmi les « posts » de mes « amis » facebook qu’une seule dénonciation du tabac dont on estime pourtant qu’il a fait plus de 100 millions de morts au cours d’un 20ème siècle qui en la matière ne devrait-être qu’une séance d’entraînement pour le 21ème (voir ici quelques données pour la France). 6 000 milliards de cigarettes seraient consommées (brûlées donc) chaque année dans le monde et cela laisse quasi indifférente la communauté écolo. Pourquoi ? 

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(*) J’établis ici une généralisation forcément injuste. Il va de soi que je présente le parti dans son ensemble et vise les positions de la majorité de ses dirigeants. Il y a évidemment au sein d’EELV de nombreuses personnes sincèrement engagées dans la défense de la nature et viscéralement attachées à la protection animale. Que ceux-ci veuillent bien excuser mes propos et en retenir le caractère global. Notons d’ailleurs que récemment sous l’impulsion de Michel Sourrouille, EELV a créé un atelier démographie en charge d’étudier ces questions. D’autre part,  un autre mouvement, le MEI (Les Ecologistes - Mouvement Ecologiste Indépendant)  d’Antoine Waechter a sur la question démographique des vues moins conventionnelles et plus réalistes, il en est de même de l’AEI (Alliance Ecologiste Indépendante).

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commentaires

B
Bonjour Didier,<br /> comme d'habitude je suis en phase avec ta vision des choses, et en particulier sur la politisation du principal groupe ecologiste et le fait de trouver trop simplement des boucs émissaires, evitant<br /> ainsi une remise en question fondamentale de nous-mêmes et en particulier de notre démographie.<br /> Je voulais juste exprimer un désaccord sur le sujet du tabac. Je pense que les OGM sont plus graves que le tabac, dans le sens où les OGM ont une incidence directe sur notre environnement et de ce<br /> fait concernent absolument tout le monde, tandis que le tabac ne concerne que ceux qui en consomment. Les non-fumeurs sont aujourd'hui protégés par de nombreuses lois et la lutte anti-tabac<br /> s'accentue au fil du temps. A choisir, je denoncerai donc les OGM plutot que le tabac.
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D
<br /> <br /> Les deux doivent être dénoncés d'autant qu'il existe des plans de tabac....OGM (et immortels) ! On arrête pas le progrès, voir cet article<br />  http://lejournaldusiecle.com/2013/01/14/du-tabac-genetiquement-modifie-et-potentiellement-immortel/<br /> <br /> <br /> <br />
T
Oui, oui,en ce qui concerne la pollution de notre air par les fumeurs, je suis bien d'accord! et encore, il y a des progrès: il y a quelques années encore, ils nous faisaient suffoquer dans les<br /> habitacles des automobiles sans une once de pitié!
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T
Tout à fait d'accord avec l'infantilisation de nos concitoyens qui va de pair avec la victimisation. Par ailleurs,tout groupe constitué a besoin de cibles énemies pour se fortifier dans son<br /> identité: s'attaquer à des cibles aussi lointaines, énormes et vagues que les banques et les multinationales permet de se donner une conscience de rebelle à moindre coût. Il en va autrement quand<br /> il s'agit de froisser certaines sensibilités electorales au sujet de la démographie...et peut-être du tabac. Mais si le tabagisme était dénoncé, cela n'aurait-il pas des airs de dictature de la<br /> santé: " Et puis, après, pendant qu'on y est , on pourra plus boire d'alcool?!"... peut-être aussi que depuis son introduction au XVIème siècle, le tabac fait encore trop partie de notre culture.Le<br /> paquet de "Troupes" était ainsi un élément indispensable au paquetage initiatique du jeune conscrit. Et puis, le tabac est parait-il, un bon antidépresseur...
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D
<br /> <br /> Vous avez raison de souligner l'utilité de l'adversaire pour assurer la cohérence d'un groupe et la mouvance écologiste ne fait pas exception à ce principe général.<br /> En ce qui concerne le tabac, la dénonciation de tel ou tel comportement pourrait en effet nous orienter vers des positions un peu dictatoriales et en général je les dénonce également. En ce qui<br /> concerne le tabac toutefois je fais une exception pour trois raisons. D'abord l'ampleur du problème, 100 millions de morts ne relève pas du détail, ensuite la facilité qu'à l'homme à se passer de<br /> cela quand il ne commence pas, on peut donc faire un effort auprès des jeunes et enfin se pose une question de liberté et de respect pour les non fumeurs. Ceux-ci ont vécu et vivent souvent une<br /> véritable dictature de la part des fumeurs qui imposent un air que je trouve pour ma part irrespirable.<br /> <br /> <br /> <br />
C
Bravo ! pleinement d'accord et de tout cœur avec vous
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D
<br /> <br /> Merci de votre petit mot et de votre soutien.<br /> <br /> <br /> <br />